Écrire une microfiction à partir du tableau de David Hockney Le Parc des Sources, 1970. (consigne de Mme Milena Mikhaïlova)
Il y a bien longtemps que je n’y suis plus allée et c’est très certainement par mégarde que je m’y suis retrouvée. J’en avais totalement oublié ces arbres si habilement, justement et droitement plantés et cette herbe verte qu’on vient fraîchement de couper. Les pigeons perchés sur la statue à l’entrée. Ça y est ! Je me souviens!
Hasard ou non, c’est le temps lui-même qui m’y a conviée ; revenir et marcher dans ces traces que j’ai autrefois foulées. Comme une promesse silencieuse du passé qu’il me faut à présent réaliser. Je m’engage dans l’allée, allure fluette et petites chaussures d’été. C’est si troublant de constater que rien, non rien n’a changé. Pas même les rayons du soleil à travers les feuilles, ni la course affolée de quelques écureuils. C’est un jour d’été, le même qu’il y a maintenant bien des années. Bourgeons éclos des roses et des lilas, comme le doux parfum de tes draps. Cela aurait pu être beau, si ce souvenir ne m’avait pas rattrapée.
Je nous revois nous enlacer devant la fontaine, ton engouement pour essuyer timidement les gouttelettes qui avait parsemé mes joues humidifiées. Puis, le baiser que j’avais osé te voler avant de m’enfuir et de slalomer entre les arbres comme une folle furieuse. Un jeu d’enfant, fuir pour mieux être rattrapée. Et nos rires qui avaient résonné. Je me revoie encore souhaiter que cela dure toute la journée...
Je me suis assise sur ces chaises qui nous ont jadis accueillis et ont écouté les confessions que nous nous étions échangées en catimini. Les oiseaux chantent cette même sonate qui nous avait bercées et les enfants jouent avec leurs cerfs-volants fabriqués. Un sourire délicat sur les lèvres, j’accueille cet instant comme un unique, doux mais puissant…
— Flash-back adolescent ?
J’ai alors relevé mes lunettes de soleil. Aveuglée, j’ai mis quelques secondes à reconnaître que l’enfant en toi a étonnement grandi.
J’ai seulement acquiescé, sans l’ombre d’un seul regret tourné vers le passé. Tu t’assieds. Toi aussi tu le sais, que le temps nous rend simplement le rendez-vous que nous avions manqué. Alors délicatement, tu as posé ta paume sur la mienne.
Et ensemble, nous avons plongé dans le silence de nos réminiscences.
Comments