Atelier slam : composer un texte en choisissant, parmi nature, chair et haine, un ou plusieurs de ces mots tout en changeant une lettre et son/leur sens.
Tentaculaire nature humaine
Faite de sang
Et de chair
Mais sans aucun sentiment
Travail à la chaîne à l’usine
À s’esquinter la santé
En 2X8
En 3X8
En 4X8
En 5X8
Et H 24
Car
Faut pas arrêter la machine
Et puis
Faut faire du chiffre
Tant de douleur et de peine
Ouvriers jetés en pâture
Pour un salaire de misère
Tout en gagnant suffisamment
Pour ne pas crever la bouche ouverte
La servitude volontaire
Sueur et bruit
Fatigue et furie
Pour faire plaisir à des patrons
Ventripotents
Qui s’en balek
Lis tes ratures
Chaque travailleur est interchangeable
Un simple pion posé sur un échiquier
Pour une partie d’échecs
Que Dieu fait avec la Mort
Et moi dans tout ça
Du haut de mon perchoir
Je voulais pas choir
Mais plutôt m’asseoir sur tout ça
Le cul entre deux chaises
La bouche en cul de poule
Sur un beau magot
Sur un beau pactole
Comme un singe en hiver
Mais direction soleil
Et une paille dans mon verre
Palmier
Cocotier
Les doigts de pied en éventail
À me la couler douce
Chaise longue
Plages de sable fin
Comme sur les cartes postales
Qui font rêver
Tangas et bikinis
Juste pour le plaisir des yeux
Quelque part sur les îles Tonga
Ou bien à Wallis-et-Futuna
Colliers à fleurs
Danses tahitiennes
Ou hawaïennes
Au son des ukulélés
Oui me la couler douce
C’est tout ce que je voulais
Mais hélas la Pieuvre
Ne me laissera pas en paix
Bailler aux corneilles
Chiller
Ce n’est pas un comportement très mature
Pour un toubab un Ti blanc
Allez hop au boulot !
Métro boulot dodo
Le travail c’est la santé
Finie la récession
Du travail y en a à chier
Pourvu que ça dure
Pas de quoi se tourner les pouces
Jusqu’à ce que ça sature
Jusqu’à ce que ça casse
À trop tirer sur la corde
Raide
Avec des raideurs partout
Comme les cadavres
Jusqu’à ce
Que le corps dise
STOP
Lumbagos
Tendinites
TMS
Burn-out
Et MST
Jusqu’à la retraite
Et même après
L’ossature pourrie
Du bateau ivre
Hydre de Lerne
Embarquée
Au milieu des Ti punch et du rhum
À porter des pagnes
Et des chemises à fleurs
Le torse à l’air
Et les idées au clair
À se bercer d’illusions
Dans un hamac
Là où les cases sont en paille
Et les filles peu farouches
Dans une sorte de paradis terrestre
Mais bientôt le grand méchant loup
Viendra souffler sur tout ça
Ou plutôt la Pieuvre
Viendra nous planter
Ses tentacules urticants
Ses miasmes
Et ses maladies
Là où ça fait mal
Mal de crâne
Mal de tête carabiné
Au point de se tirer une balle
Pour faire passer la douleur
Tracer dans l’air
Des obliques rouges et fugitives
Mais j’ai mal à l’aine
Ou plutôt mal à l’aise
Timide et bafouillant
Étouffé par la malbouffe
De notre continent
Développé
Mc Donald
Burger King
Et tutti quanti
Tous les affameurs
De tous les pays
Y a rien de plus mauvais
L’huile de palme
La Déforestation
Le Progrès
La Société
La Récession
Ou bien encore l’Inflation La dépression
De notre société
De consommation
L’obsolescence programmée
Le Capitalisme
Ramure
Armure
Armurier
Quelle drôle d’allure
Il faudrait peut-être
Penser à
Réduire la voilure
Pour peu que ça te rassure
Dans un ciel bleu azur
Et sans couche d’ozone
Pour nous protéger
Des radiations nocives du Soleil
Un avion supersonique long courrier
Dessine un trait
Au blanco
Dans le blanc opiacé de tes yeux
Là où coule encore une larme
Pleine d’espoir
Sauf que tu te berces d’illusions
Une fois encore
Il s’agit ici d’un noir horizon
La pollution
Le réchauffement climatique
La fonte des glaciers
La montée des eaux
Pour un nouveau Déluge
Annoncé
Un nouvel Arche de Noé
Après les Twin Towers
Dans un mauvais remake
De Babylone
Electro-pucée
La misère humaine
Le Tiers monde
La Covid19
La pandémie mondiale
Et le confinement forcé
Qui nous prive encore un peu plus
De notre liberté
Nous rendant d’autant plus asservis
À la machine
Et esclaves du système
La roulette tourne
Faites vos jeux !
Mais déjà tu tournes de l’œil
Et les talons
Vas-y c’est bon casse-toi
Ma vahinée
Aux lèvres sucrées
Sucre de canne
Canne à sucre
Esclavagisme
La guerre de sécession
La traite négrière
Le commerce triangulaire
Les champs de coton
Vanille et Aloe Vera
C’est sans doute mieux comme ça
Moi je resterai là
Les doigts de pied en éventail
La tête sur mes bras croisés
A regarder d’en bas
Bien sagement
Les avions qui passent
Dans tout ce bordel
Qui nous sert de ciel
Et d’avenir bouché
Et sombre
Sauf que la Pieuvre
Au fond de moi grandit
Sans espoir de rémission
L’argent n’a pas d’odeur
Mais le fric sent la friture
Le big-mac
L’alcool bon marché
Et les putes
Le sang pue le fer
Et l’oxydation
Qui en résulte avec l’air
Le fer que l’on plie et débite à l’usine
Le dos plié sur la machine
Pour finir manchot
A quarante piges
Handicapé
Et cassé
De partout
Des douleurs aux bras
Aux mains
Aux coudes
Aux épaules
Aux jambes
Aux genoux
Au dos
Et alors on prie
Quand il est trop tard
Quand on croit encore bien naïvement
Que notre état va s’améliorer
Cloué sur un lit d’hôpital
Blanc et froid
À regretter
Ces moments de folie
Et de détente
Que toute notre vie
On n’a pas pris
Et puis tant pis…
XK (Limoges, le 19-11-21)
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