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Photo du rédacteurMarie Pompier

Le bout de la langue

Dernière mise à jour : 29 mars 2022

"Carnation". Écrire au maximum une page A4 “inspirée” par La Grande Odalisque d’Ingres. (consigne de Jean-Michel Devésa)


– Tu crois qu’il faudra combien de temps avant que tu ne me détestes ?


Je brûle de te demander. Je sais que la question est empoisonnée, je sais que le motif est éculé. Je me trouve niaise avec mes considérations qu’elles ont toutes eues avant moi. Tu nous crois sûrement plus naïves. Peut-être l’es-tu toi-même. Prise par cette chaleur intestine, tu perds le sens du demain. Mais laisse-moi te raconter ce lendemain.


D’abord, tu oublieras que tu m’adores. Quand tes yeux ne seront plus surpris d’une inclinaison ou d’une variation de ton, comme à toutes celles avant moi, comme à toutes celles avant toi, tu t’habitueras. Puis ton art que j’aimais tant bouffera tout l’espace. Alors je sortirai prendre l’air. Tu seras exposée, mon amour tu es douée. Et si aujourd’hui tu ne me crois qu’à toi, bientôt tout ton monde me verra. Bien sûr on louera ton talent. Mais derrière toi, peux-tu affirmer que personne ne me verra moi ? Peut-être qu’il me passera une note, un billet de roman. Imagine qu’il est charmant. Je résisterai ? Tu crèveras de doute. Tu me traiteras de pute, me balanceras ma nudité au visage et cracheras sur ce que je t’ai donné. D’ailleurs c’est con de dire donner. Parce que je n’ai jamais été tienne. Comment reprendre, sinon, ce que je t’aurais offert ? Je devrais attendre ton dégoût pour partir ? Tu veux que je reste parce que je n’ai pas le choix ? Mon ange tu vaux mieux que ça.


Tu vois que je ne suis plus là ? Moi quand je te regarde je vois tellement plus. J’aime tes bras, ta gorge, tes yeux tombants, mais j’aime surtout ta voix. J’aime ton rire, j’aime ton talent. J’aime quand tu parles, j’aime quand tu fais sens. Comment comptes-tu leur montrer mon sens à moi ? Tu penses que c’est d’être belle ? J’ai peur que ce soit pour ça que tu es là. Tu peins pour eux ou pour toi ? Non ne mens pas, ça n’a jamais été pour moi. Mon cœur, j’aurais tellement aimé que toi aussi tu voies plus qu’une parle quand tu me regardes. C’est rare d’être belle ? Non, la prochaine le sera sûrement.

Et si je te dis tout, oui tu voudras me rassurer. Mais comme ça sonne faux après l’avoir demandé. Donc tu t’énerveras, je pleure, tu hurles, tu t’égosilles, tu es laide mon amour. Pourtant j’aimais ta voix.


Tu vois comme avec une seule question je pourrais tout briser. La bombe attend, son goût sur mes lèvres me tend d’un sourire. Tu te charmes de mes fossettes. Mais si tu savais mon ange combien de colère elles ont contenu, les peindrais-tu ? Tu n’entends pas le faux, c’est tant mieux ma chérie. Ne t’en fais pas pour la bombe, on m’a trop souvent dit sois une perle et tais-toi.



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