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Mi Cariño

Écrire une microfiction en intégrant dans l’ordre que vous souhaitez “blessure”, “lumière” et “pamplemousse” (consigne de Mme Milena Mikhaïlova)


*Jeudi, 17h15


Le soleil arrivait enfin derrière le grand bâtiment blanc et venait inonder les salles où les rideaux n’étaient pas baissés. Alors que dans certaines chambres l’on pouvait entendre des soupirs de soulagement et presque des ronronnements de la part des résidents et résidentes qui accueillaient cette luminosité et cette chaleur joyeusement, ce ne fut pas le cas dans une de celles qui avait ses stores tirés au plus bas. Un léger rayon de lumière réussit à se faufiler par un interstice et vint atterrir en douceur sur un visage qui se réveilla face à l’intrusion sur ses paupières.


Le jeune homme ouvrit ses yeux pour ensuite les refermer. Il répéta cette opération plusieurs fois, et émit un grognement. Ses multitudes de tâches de rousseur bougèrent lorsqu’il fronça son nez. C’est encore Maman qui est venue ouvrir mes volets pour me lever plus tôt, j’y crois pas ! fut sa première pensée. Cependant, alors qu’il voulut passer une de ses mains sur son visage et dans ses cheveux pour se réveiller, ou faire déguerpir ce rayon taquin de ses iris noisettes, il se heurta à un mur.


– Matthias ? chuchota une voix à côté de lui.


Son corps engourdi lui permit de tourner la tête pour poser ses yeux sur une ombre assise à côté de lui. Ombre qu’il entendit se lever pour aller chasser cette lumière. Aussitôt le faible rayon aveuglant disparu, aussitôt le roux allongé de tout son long dans un lit blanc se réveilla vraiment. Il était dans une chambre d’hôpital, un pied en hauteur et un bras en écharpe.


– Tu veux boire un peu ? Les infirmières m’ont dit de te faire boire dès que tu serais réveillé. reprit la voix qui était retournée à sa place.


Une paille en papier vint lui titiller les lèvres, et, passé la première gorgée, il but d’une traite sans respirer ce précieux liquide rafraîchissant. Retenant un rot, il soupira d’aise.


– Ça fait du bien par là où ça passe.

– Moi qui craignais que tes quelques cellules grises se soient fait exterminer… Tu m’as fait une de ces peurs, tonto (1) ! s’énerva doucement le brun, encore sous le coup de l’émotion.

– Et que me vaut ce doux nom, mi corazón (2) ?


Matthias n’avait aucune espèce d’idée de pourquoi il était dans un lit avec une jambe suspendue comme ça et un bras qui le grattait affreusement mais dont la zone n’était pas vraiment atteignable. L’autre jeune homme se frotta les yeux puis prit gentiment la main valide du blessé. Sur celle-ci aussi il avait l’air d’avoir quelques blessures, plus ou moins superficielles car pansements, bandage et filet pour maintenir tout ça lui faisaient comme une manche blanche.


– Essaie de te rappeler, mi patata roja (3). Mercredi, hier, on avait rendez-vous… où ça ?

– Euh… le rouquin sembla hésiter un instant, encore dans le pâté, et puis : Ah oh je sais, au cinéma !– – ¡Alegría ! ¡En buena hora! No se convirtió en otra persona. Y le quedan neuronas (4).

– Hé ! Ça j’ai compris ! Je suis pas idiot non plus. J’ai juste… mal à la tête… et au pied, Esteban.


Le susnommé s’excusa avant de passer sa main dans les cheveux de son petit copain en vrac.



*18h45


– Alors en résumé… Pour une fois, j’étais pas en tort sur mon scooter quand cette voiture m’est rentrée dedans ?

– Non, j’ai tout vu, tu étais littéralement au bout de ma rue. C’est, tu sais, Hervé…

– Ah oui, ton voisin qui passe son temps au bar. Et… qui n’a normalement plus le permis ?

– El mismo (5) ! Ma mère l’avait dit qu’il provoquerait un accident, et voilà où on en est ! s’emporta Esteban en balançant ses jambes sous le lit.

– Ça va, je suis en un seul morceau ! plaisanta l’hospitalisé, malgré la gravité de la situation.

– Menos mal (6)… grommela le brun en tapotant sur l’écran de son portable. Tiens, ma mère te passe le bonjour, zorrito (7). Elle passera peut-être demain.

– Oh chic ! Dis-lui de me ramener des ensaimadas aussi. Allez steuplé !

Esteban exagéra une fausse grimace d'exaspération, laissant vite place à un sourire scintillant orné de bagues dentaires. Ce dernier attrapa son sac au pied du lit, et déposa un baiser qui sentait bon le pamplemousse frais sur les lèvres de son rouquin qui, suffisamment réveillé, commençait à faire le pitre grimaçant, les antidouleurs étant en bout de course.


Un ciao bye, un hasta mañana (8), et il quitta la chambre avant que le plâtré immobilisé pense à demander dans quel état était son scooter chéri.


(1) "Abruti"

(2) "Mon cœur"

(3) "Ma patate rousse"

(4) "Bravo ! A la bonne heure, il n’est pas devenu une autre personne. Et il lui reste des neurones."

(5) "Celui-là même !"

(6) "Encore heureux"

(7) "Renardeau"

(8) "À demain"



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