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Mystères de nature

Écrire une microfiction à partir dutableau de David Hockney Le Parc des Sources, 1970. (consigne de Mme Milena Mikhaïlova)



– C’est une belle journée, commença-t-elle.

– En effet, ajouta-t-il. Même si l’air sent la pluie, ça ne devrait d’ailleurs plus tarder.

La femme à la chevelure aux légers reflets de feu se mit à émettre un petit rire. Elle ne croyait pas en ce genre de dires. On ne pouvait prédire la pluie de cette façon. La météorologie dite moderne était une science encore balbutiante, et montrait peu de résultats à fort pourcentage, pour le moment. On ne pouvait donc être sûr par ses sens humains qu’il allait pleuvoir dans la journée, ou encore dans l’heure. C’était une idée ridicule, mais elle se garda de le dire. Seulement, comme si l’homme avait décrypté ses pensées, ou peut-être son rire, il articula en hochant lentement et légèrement la tête en avant.


– Je sais que vous ne me croyez pas. Vous ne me croyez jamais.

– Vous exagérez sur le jamais. Seulement, vous savez que c’est la science qui peut prédire ceci. Elle peut prédire beaucoup de choses.

– La science n’est que la traduction pour les humains des éléments de la nature. Il y a le phénomène de science et le reste. La nature reste secrète.

– Vous parlez vraiment de ce qui se trouve autour de nous, ce que nous n’avons pas encore expliqué, ou alors vous parlez de ce qui se cache dans votre tête ?


Ce fut au tour de l’homme d’avoir un petit rire. Il lissa le tissu brun de son pantalon avec le plat de sa main, puis ses doigts jouèrent avec la feutrine de son chapeau, qui jusque-là était resté bien sagement sur ses cuisses.


– Choisissez ce qu’il vous plaît, finit-il par dire, ses yeux parcourant les allées vides et le jardin s’étendant devant eux. Malheureusement, la psychologie est encore un phénomène trop nouveau pour être pris au sérieux, n’est-ce pas ?


La femme acquiesça silencieusement. Elle ne le savait que trop bien. Le cerveau tout comme la nature étaient, au fond, des éléments bien mystérieux, qui passionnent et dont l’humain veut percer les secrets les plus enfouis. Pour la connaissance ou le pouvoir.


Quelques gouttes tombèrent sur la fine peau blanche de la femme. Le reste fit entendre leur chute sur le sol en un léger crépitement, qui ne tarda pas à s’accélérer. L’homme remit son chapeau en souriant. La femme qui lui avait rendu visite se garda bien de dire quelque chose. Fort heureusement, une infirmière arriva avec deux parapluies, un qu’elle tenait au-dessus de l’homme, toujours légèrement souriant et un autre qu’elle tendit à la femme. Cette dernière la remercia puis prit poliment congé de l’homme, quand celui-ci lui dit avant de s’engouffrer dans le bâtiment crème, pour rejoindre sa chambre.


– Vous devriez vous dépêcher de rentrer, le vent va devenir violent et vous finirez trempé jusqu’aux os. A la semaine prochaine, chère Thérèse.


Sur ces derniers mots, la femme, quelques cheveux collés sur son visage, regarda le patient de l’hôpital psychiatrique disparaître dans la pénombre de la bâtisse. Elle ne tarda pas à resserrer les pans de son manteau autour de son cou, le vent se faufilant dans les interstices et faisant diablement danser le tissu lâche au niveau de ses jambes. Les feuilles des arbres rangés en file indienne bruissèrent de plus en plus fort lorsqu’elle tourna les talons pour trottiner jusqu’au parking, à l’autre bout de cette longue allée.



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