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Photo du rédacteurInès Bardou

Pénombre

Dernière mise à jour : 29 mars 2022

Écrire (au plus) une page (A4) en commençant par la formule empruntée à André Breton : "il me fait jouer de mon vivant le rôle d’un fantôme" (dans "Nadja"). (consigne de Jean-Michel Devésa)


Il me fait jouer de mon vivant le rôle d’un fantôme. Une entité me guide à chaque instant et ne me permet pas de vivre. Elle me fait disparaître. Du vivant, je deviens un souvenir, une empreinte du passé qui ne cesse d’errer dans un présent auquel je n’appartiens plus. Spectrale, ma condition ne semble pas vouloir évoluer comme emportée par ce tourbillon de sensation qu’il m’oblige à affronter. Mon errance émotionnelle est habile, silencieuse, elle agit sans un bruit. Le bien-être, fantomatique, ne cesse de faire semblant, envoyant des messages qui ne sont pourtant pas réels. Le conscient a-t-il conscience de l’inconscient qui se joue de lui ? La dimension rhétorique de la question renvoie à la fatalité de l’existence humaine et la dimension inatteignable qu’elle suppose. Aujourd’hui mon vivant n’est qu’ectoplasme, émanant de moi et s’évaporant par les pores de mon corps. Son inconsistance évoque son inconstance à être. Demain, je ne saurais exister, disparaissant dans l’étau de cette sombre existence. Hier, j’étais, aspirant à aimer, n’imaginant pas, un instant la destruction imminente que deviendra mon futur. Ce lendemain guidée par la pénombre et vraisemblablement évanescente.

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