Sans Atout, notre héros éponyme n’en était pas dépourvu. Au contraire, vif d’esprit, il avait avec lui la curiosité et le courage. La seule chose qui le desservait en somme, c’était sa petite taille. À mi-chemin entre l’homme et le nain, comprenez donc entre chien et loup. Déjà tout petit, le cul entre deux chaises, il faisait l’embarras de ses parents, et provoquait les railleries quand ce n’était pas les coups qui pleuvaient sur lui. Sa pauvre mère pleurait matin, midi et soir, ce qui l’attristait d’autant plus.
Si bien qu’à huit ans à peine, après avoir longtemps mûri la question, il décida d’aller de par le monde, nourrir sa curiosité et gagner son propre pain noir. Il rassembla alors son baluchon et toutes ses affaires, ce qui lui prit peu de temps en vérité, car ses parents habitaient une pauvre masure à la sortie du village, à l’orée même de la forêt. Là où des fauves poussaient des cris inquiétants la nuit, entre deux sanglots maternels difficilement éteints.
Il ne fit pas ses adieux à ses parents, il laissa simplement une lettre à leur attention en leur disant de ne pas trop s’inquiéter pour lui, et que le jour où il serait grand il reviendrait et il ferait leur fierté ! Il profita donc à ce qu’ils soient tous deux affairés aux champs pour sécher l’école à l’impromptu et tailler la route comme on dit, ou plutôt le chemin caillouteux qui lui tendait les bras.
Plus loin, il demanda à un bûcheron surpris de le voir traîner par ici, littéralement scié en deux pour ne rien vous cacher, quelle était la route la plus sûre pour sortir de la forêt. Ce dernier balbutia à demi-mot qu’il n’y avait qu’une seule route, peuplée de brigands, de bêtes féroces et d’arbres maléfiques ! Il le remercia alors et continua son petit bonhomme de chemin.
Après avoir longuement marché, il tomba ensuite sur une jolie maison en bois. Là, un sorcier très aimable lui proposa de le prendre sous son aile et lui enseigner les rudiments de la survie en milieu hostile ainsi que quelques notions en chiromancie.
Sans transition, Sans Atout se fit alors un nom, grandissant à force de magie aussi soudainement qu’une anacoluthe en perdition à la fin d’une phrase.
Crédits : Illustration (1867) de Gustave Doré (1832-1883) pour le Petit Poucet, de Charles Perrault.
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