Rédiger une version condensée de notre monologue en une page. (consigne de Paul Francesconi)
Aller… fais-le. Aller...Oui, c'est ça...aller... Non ! Mais...C'est pas vrai ?! C'était quoi, c'est quoi ça ? Ben ?! Il est parti, juste là, comme ça, parti ? Il laisse Rebecca, là, comme ça ? Juste, là, comme ça ? Il la plante là et il part ? Il l’a pas plantée, il l’a enterrée, six pieds sous terre ! C'est... Nooon ! C'est la quatrième saison de la romance « Jabecca », et après touuut ce temps, il s'est barré ? Faut avouer qu'il n'a jamais porté ses couilles aussi, si ? Non ? Bah voilà. Il l'aime, elle le sait : c'est évident. Elle lui attrape la main, ils se regardent, elle soupire, il lui sourit, elle lui dit, eeet… Il lâche une bombe. 3,2,1... « C'est trop de pression », «je dois penser à mon avenir », « c'est pas toi c'est moi », et le bouquet final « tu seras mieux sans moi ».
Bien sûr que c'est toi Jason, que t'es un lâche, qu'elle sera largement mieux sans toi et que t'es un bon à rien ! On tient l'amour, on résiste pour lui. C'est ce qu'elle fait Rebecca. Elle, elle tient, parce qu'on passe une vie entière à le chercher, à le traquer, parfois. Elle le sait que certains ne le vivent jamais, et puis t'as les autres, là... Ceux qui le gâchent !... T'as pas dit un mot. J't'ai pas laissé en placer une tu me diras. T'en penses quoi, toi ? Ça te fait rien ? Ça fait quatre saisons quand même… Tu dis pas un mot. Ben ? Est-ce que t'espères pas un peu que les réalisateurs soient cupides ?... Sinon, ça voudrait dire qu'on pourrait vraiment faire ça ? J'veux dire, tout abandonner, lâcher une bombe… Être stupide... Ben ? Non ! Nonono no way, pas question. Pas possible. Non, tu le défends pas. Ha, alors ça ? Non plus. Non, tabou, forbidden. C'est pire. Bien pire. Au bout de quatre ans de relation ambiguë durant laquelle on se voit tout le temps, des nuits complètes de complicité partagée, de séries entières, de débats sur la réalisation de l’amour, bref où on parle de tout sans tabou sauf de nous ! Et il casse tout. C’est de la torture, une perte de temps. C'est trop facile, trop bête... C'est trop lâche. Non, nonnononon, chuuut. Imagine. Imagine-toi à sa place, celle de Jason. Moi, j’suis Rebecca, on est au parc, sous les étoiles, Orion à l'horizon sous fond de Voie Lactée, un verre de rouge à peine entamé, et on est.... Imagine avec moi, s'il te plaît… Jason ...? (il sourit) Là, elle lui dit que c’est la grande ourse, et son ourson. Et, imaginons que… Cette étoile soit morte… Ça fait réfléchir hein ?... Que même les étoiles puissent mourir… (Temps) Ça t'arrivait à toi aussi ? Pas de mourir, de réfléchir. Enfin, bien sûr que ça t'arrive....Mais de te dire qu'on était bien pitoyable de prier l'infiniment grand de nous faire une place, comme si une fourmi pouvait espérer être écoutée de tout Paris ? Ça m'arrivait, tous les jours. J’en perdais même mes rêves de nuit au profit de ces interrogations futiles. Je scrutais le firmament à la recherche d'un souhait à exaucer. Mais je ne veux pas que le ciel l’exauce à ma place. C'est pas ça, non. C'est la force de l'exprimer, de m'exprimer que le ciel doit m'accorder. Et il l’a fait ! Je n’ai plus les nuages gris qui embrumaient mon esprit : je vois les couleurs ; chaudes et froides. Je vois des tâches, des nuances et des détails. Je vois l’émeraude scintiller dans les feuilles d’été, je vois le sulfureux rouge dans des lèvres qui n'attendent qu'à être capturées... L’inimitable bleu du ciel qui brille, flamboie dans des yeux-ciel, comme si les nébuleuses qui aspiraient mes lumières autrefois ne l'avaient fait que pour m'éblouir à travers les étoiles de ces deux cieux, maintenant et à jamais.... Comme un trou de ver, une machine à remonter le temps. Je parle d'une machine à remonter le temps, parce que j'ai réalisé tellement de choses avec toi, Jason. Je comprends maintenant ces deux personnes qui se tenaient la main comme si elles risquaient de se perdre à jamais dans la Vie. Je comprends qu'on puisse être si heureux que vivre perdrait tout son sens, ce serait risquer de détériorer cette photo parfaite. Je comprends mon souffle-court, « les papillons dans le ventre », « les étoiles dans les yeux », le « cœur qui bat la chamade ». Je le sais maintenant. C'est « mon cœur dans un trou de ver ». Il traverse l'espace-temps à la recherche de chacun de nos moments. J'aimerais pouvoir arrêter le temps, ou sans arrêt vivre ce moment et le rembobiner, encore et encore... Une fois de plus, et une fois de trop... Admirer les constellations, laisser virevolter la Voie Lactée sans que son trajet ne puisse nous altérer. Je sais qu'aujourd'hui est différent. Je sais qu'aujourd'hui je vois le sens dans les constellations. Je vois les constellations dans tes yeux, tes yeux hantent mes rêves, ma vie est un rêve éveillé... (Temps) Jason... ! Regarde-moi. Transperce-moi de tes yeux-ciel...(Temps) Ben... Je t'en prie... Quatre ans…Ben ! … REGARDE MOI JE T'EN SUPPLIE !
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