top of page
  • Photo du rédacteurSuzanne

111

Parfois, je me demande si je ne fais pas semblant.


En toute innocence et en toute inconscience, la solitude, peu à peu, a écorché ma confiance. Demain, cela fera deux mois que j’ai quitté cet ancien chez soi pour fonder un chez-moi. Nouvelle indépendance suivie d’une prise de conscience, mes murs blancs se sont retrouvés vert folie puis violet envie. Hésitations qui mènent à la consultation, une certaine réalité concernant ma santé est confirmée bien qu’il me reste encore quelques tests à passer. Le chez-moi devient un chez Je. Qui est moi, qui est Je ? Je est moi mais Je est un autre. Frappée par la vérité, je rembobine ma vie à la recherche de tous les indices égrenés dans les bribes de mon passé au risque de m’effacer. Je n’est plus au présent, Je est au passé.


Puis, nous arrivions à aujourd’hui. Dos posé contre le siège molletonné, j’écrivais ces quelques lignes dans l’obscurité la plus totale. Pensées floutées, durée du tunnel prolongé. J’étais ici, toujours à rembobiner ma vie. Au sens propre comme au sens figuré, j’allais à contresens en toute conscience. Mais l’inconscience marquait aussi son passage ; sans trop savoir comment je m’étais retrouvée dans le sens opposé de l’arrivée. Bref, j’étais ici. Ici, c’était dans un train ; face à ma nouvelle vie je reculais jusqu’à mon ancienne ville. Allais - je reculer assez pour m’enterrer entre les bras de ma mère ? Sans aucun doute, mais toujours un regard sur tout ce que j’ai pu affronter. J’avais craqué, et au lieu de profiter de ma nouvelle réalité, de visiter ces ruelles qui étaient miennes et de me reposer, je m’enfuyais. La question que je me posais à l’instant-T était la suivante ; ce que je subissais, n’était-ce pas une renaissance ? Renaissance en nain, sur les épaules de géants afin d’y voir plus loin, d’avoir un mode de vie plus sain. Rembobiner pour regarder ce que j’avais achevé d’un œil plus éclairé. Pour être honnête, je n’en avais aucune idée car pour l’instant je restais ancrée au passé. Encore, et encore.


11h11 ; j’ai oublié ce que cela signifiait mais c’est l’heure qui était indiquée sur mon PC. Si le 222 marquait mon arrivée, le 111 suivait ma nouvelle réalité. Peut-être aurais-je dû me renseigner afin de voir ce que les anges me préparaient pour mon arrivée. Ces trilogies numériques, jamais je ne pensais m’y fier néanmoins un humain terrifié a toujours besoin de se repérer. Et c’est ce que j’étais, terrifiée. Terrifiée à l’idée de devoir enterrer des espoirs qui m’avaient guidé ces vingt dernières années, comme celui d’un jour ne plus être fatiguée ou bien d’un jour pleurer pour quelque chose de sensé. Mais comme la Toussaint qui arrivait demain l’indiquait, il était temps, en ce 31 octobre, de vider mes placards de leurs cadavres.

8 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

No et lui

Un peu plus de quatre-vingts années qu’il respirait, à peine moins que je me le coltinais à longueur de journée ; les décennies s’étaient écoulées bien plus rapidement que je ne l’aurais souhaité. La

Travailler sur son trauma.

Pendant longtemps je suis restée traumatisée par le souvenir d’un pantalon baissé pendant la cour de récré. Pensées un peu trop obsédées d’un gamin du même quartier, la mémoire m’a tenue éveillée jusq

Le petit rôle

Le sourire pincé et l’air guindé je me complaisais dans une existence végétative qui avait le luxe de m’épargner l’embarras des besoins. Ravie d’être sous les projecteurs, à cette époque, je n’avais p

bottom of page