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Photo du rédacteurLouise

Jamais immortelle

Moi aussi j’aurais voulu goûter à la joie de l’immortalité. Mais pour cela je devais d’abord survivre à l’autre. Et la survie n’est pas une forme d’existence compatible avec l’immortalité.


L’immortalité c’est la perpétuité du nom. Là où le mien est celui du père puis du mari.

L’immortalité c’est la perpétuité de l’identité. Là où la mienne est soumise à l’expertise capricieuse des phénomènes qui m’entourent.

L’immortalité c’est l’inexpérience de sa mortalité. Là où la mienne est actée depuis le plus jeune âge pour me prévenir des risques que j'encours.

L’immortalité c’est la puissance en puissance. Là où ma force est ramenée à de l’impuissance et ma vulnérabilité critère de tolérance.

L’immortalité c’est la transcendance de soi. Là où mon existence est assignée à un genre qu’il ne convient pas de dépasser ni de s’approprier.

L’immortalité c’est croiser son âme au détour d’un voyage et lui dire je te vois. Là où ce n’est pas mon regard mais celui de l’autre qui soumet ma trajectoire.

L’immortalité c’est pouvoir embrasser son identité et ne jamais la trahir. Là où je suis soumise au déguisement pour survivre.


L’immortalité c’est la fièvre de la vie. Là où nous sommes cantonnées à des perspectives de vie. Ces images heureuses où nous pourrions nous engouffrer dans la nuit sans préoccupation aucune que notre direction. Ces issues où nous ne craindrons plus de cacher nos formes tant fantasmées. Ces vies où nous ne serions plus paranoïaques à l’idée que toute autre partie risible de notre corps puisse alimenter un nouveau fétichisme. Ces illusions où nous ne serions plus restreintes à un rapport de soi à soi pour digérer toutes ces violences.

Notre existence est blasphème depuis la genèse et notre incomplétude actée depuis notre extraction à partir de la côte du premier homme.


L’immortalité c’est l’explosion de soi. Là où notre colère acte notre déchéance, ramenée à une hystérie latente qui cristallise un peu plus notre être.


C’est pourquoi pour arracher de son vivant sa propre vie à toutes les formes de la mort nous devrions d’abord arracher de notre vivant notre propre vie à toutes les formes de l’Autre. C’est pourquoi dans cette société nous ne connaîtrons jamais l’immortalité.


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