Les papillons

Les papillons dorment. C’est paisible. Ils vivent en myriade assoupie comme des champs de fleurs dont les pétales bruissent seulement. Parfois on ne sait même pas qu’ils sont là. On s’imagine qu’il ne s’agit que d’une métaphore. Après tout, ce ne peut être que ça.

On ne se rend compte de cette colonie délicate qu’avec le mouvement. Un orage émotionnel se lève sans qu’on y prenne garde, un coup de foudre s’abat et voilà le vent et la pluie. Les papillons s’envolent soudain, comme un nouveau nuage coloré, un nuage neuf et vivant. Ils s’élèvent, tanguent, houlent, chamboulent, bouleversent tout. Et quand l’orage premier s’apaise, que le pétrichor monte des chemins, on comprend. Les métaphores sont des vérités trop grandes pour être crues sans les vivre.

Ma colonie s’est réveillée un jour d’automne quand se sont posés sur moi ses yeux verts. Elle était belle, et le tourbillon s’est soulevé dans un flash de lumière. Nous nous sommes connus, nous nous sommes reconnus, et depuis, nos papillons dansent ensemble.