Mes pieds font grincer le parquet quand je marche le long du corridor. Pourtant, il n’est pas fait de portes, mais un peu comme elles, à chaque tournant se trouve un renflement ouvert. La vue globale me fait même penser qu’on peut tourner ça et là, mais ce n’est pas le cas, seuls des aquariums se cachent là où l’on croit deviner un nouveau couloir ou une nouvelle salle.
D’abord, ce sont des poissons en tissu. Ils trônent sur une étagère abîmée qui contraste avec le reste de ce que ma vue périphérique peut attraper : un soin particulier aux détails. Quand mon copain me pousse doucement sur le côté pour avancer, Némo et Dory caressent ma joue. Face à ces répliques étranges des plus célèbres des poissons se trouvent de faux rochers et de la végétation en plastique. Quand je me penche par-dessus la barrière, ce qui est déconseillé par un petit encadré à ma gauche que j’aperçois trop tard, je constate d’énormes tortues au fond de l’eau. Derrière moi, des poissons minuscules filent à toute allure. Les aquariums sont encastrés dans une décoration de sous-marin, et j’ai comme l’impression d’une mise en abyme : un sous-marin dans un sous-marin. Cet endroit n’est pas sans rappeler un souterrain, une grotte que l’on aurait façonnée de sorte à l’agrandir, mais ce premier couloir est taillé en cylindre, à l’image d’un submersible. Les vivariums se succèdent dans l’horizontalité de cette première ouverture. Il y a des piranhas. Ils sont absolument inertes, un peu comme moi, qui bloque le passage pour les observer avec curiosité. Leur presque inanition contraste avec la maison d’eau du dessous, où des raies et des poissons de toutes sortes remontent jusqu’à la surface. “Interdiction de toucher”. Je me retiens de passer les doigts sur une raie pour respecter la règle, mais surtout pour éviter de donner de mauvaises idées aux enfants qui ne cessent de passer à mes côtés.
Leur course sur le parquet couvre la musique d’ambiance, tout ce que j’entends est le bruit de l’eau que je n’entends pas, pas même celle que j’ai sous les yeux, accessible, pourtant frappée par les ailerons des alevins et les impulsions des petites raies comme des tapis nageants. Au sol, une seule et unique lumière : un carré métallique qui laisse en son centre s’évader un jet de néon couleur océan. La chaleur de la pièce est assez dense, mais l’eau qui abrite chaque animal me paraît froide. Je m’attarde sur les petits panneaux informatifs mais ne les lis pas vraiment, chaque coup de nageoire d’un poisson me détournant de mon apprentissage. Au fond, une jeune femme nous appelle, prête à nourrir de véritables prédateurs des mers affamés qu’il me tarde de découvrir après ce premier corridor longuement visité.
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