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  • Photo du rédacteurEli

Sourire factice

« Ça va ? »

Perdu dans tes pensées, tu n'enregistres presque pas la question. N'étais-tu pas seul il y a seulement un instant ? Mal à l'aise, tu ne peux réprimer un frisson lorsque tu rencontres le regard de la personne, à peine plus qu'un inconnu à tes yeux. C'est une forme de politesse. Tu le sais, tout le monde le sait. Personne ne pose cette question pour recevoir une réponse honnête. Malgré cela, ton esprit ouvre les pages de l'album de ta vie et caresse de ses doigts inexistants les photos immatérielles qui te rappellent des souvenirs de la douceur d'une plume comme de la morsure du feu.

Comment te sens-tu réellement ? Tu te poses parfois la question toi-même, sans jamais avoir une réponse satisfaisante. Tu baignes dans un environnement amical et bienveillant depuis plusieurs années mais tu ne peux t'empêcher d'entendre les chaînes de ton passé s'entrechoquer à chaque mouvement et de sentir la froideur de leurs entraves s'enfoncer dans ta tendre et fragile chair. Pourquoi ? Pourquoi, après tant de temps, les blessures de ton enfance sont toujours ouvertes ? Pourquoi les autres arborent fièrement des cicatrices, propres et preuves de leur résilience, lorsque ta cage thoracique s'ouvre telle une dionée affamée pour déverser sur le sol un flot de sang ?

Le lourd regard posé sur toi t'arrache de ton tourment intérieur. Oui, cette personne t'a posé une question de politesse. Tu sais qu'elle n'attend qu'une réponse dans l'affirmative, elle ne te connait pas assez pour se soucier de ta santé mentale. Alors, tu plaques un sourire sur tes lèvres, vide de réelle joie, et enfonces tes ongles dans la paume de tes mains.

« Ça va... »


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