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  • La princesse Sorina et le comte Dracula

    Il était une fois, dans la lointaine Transylvanie, une région mystérieuse de Roumanie, vivait un comte dans une somptueuse demeure. Comblé par tous les bienfaits de la vie, le jeune homme qui se nommait Dracula était connu comme quelqu’un de charitable et généreux envers les villageois. Malheureusement, le comte eut un jour le malheur de croiser le chemin d’une méchante fée qui désirait l’épouser. Celui-ci refusa maintes fois les demandes répétées de l’enchanteresse et une nuit, exaspéré, il la repoussa plus durement que d’habitude. Furieuse, la fée se dévoila dans toute son apparence maléfique et en guise de punition, elle transforma Dracula en vampire et jeta un sort sur le manoir et tous ses occupants. Maudit et désespéré par son destin de créature de la nuit, le comte Dracula se terra au fond de sa demeure entouré de ses serviteurs, désormais invisibles. Pour rompre la malédiction, il faudrait que le comte se fasse aimer d’une femme humaine afin de pouvoir briser le charme. Sinon, il serait condamné à rester un vampire pour l’éternité. Au fil des ans, le comte Dracula perdit tout espoir d’espérer, un jour, retrouver son humanité. Après tout, quelle humaine serait assez censée pour tomber amoureuse d’un vampire ? Quelques années plus tard… Tandis que Dracula et les siens s’étaient peu à peu fait oublier dans l’est de la Transylvanie, à l’ouest du pays régnaient un roi et une reine qui avaient trois enfants : deux fils, les princes Aurel et Oscar, et une fille, la princesse Sorina. La beauté de celle-ci était si éclatante qu’elle était surnommée par ses frères “La Belle de Transylvanie”. Or, pour une raison que tout le monde ignorait, le roi et la reine ne s’intéressaient qu’à leurs fils, les héritiers du trône, délaissant leur fille unique. La princesse avait beau être fort belle, mais aussi instruite, douce, travailleuse et honnête, elle n’attirait sur elle que tracas et désillusion de la part de ses parents. Un beau jour, la jeune fille en eut assez de cette vie d’injustices, de reproches et de coups : elle décida donc de quitter le château en secret et de partir explorer le vaste monde qui l’entourait. Avec la complicité de ses frères, la princesse Sorina parvint à sortir du château sans se faire remarquer de quiconque. Puis, le corps et les cheveux vêtus de voiles aux couleurs claires, elle s’engagea sur les chemins ombragés de son pays, désireuse de connaître la réalité du cœur des transylvaniens. Hélas, partout où elle se rendit, Sorina fut toujours fort mal reçue par les gens de son royaume, nobles ou paysans. En fait, ils avaient surtout peur d’elle à cause de ses étranges vêtements et ce, malgré sa beauté évidente. La pauvre princesse se retrouva bientôt à errer comme une âme en peine dans l’est du pays, épuisée et dans un pitoyable état. Un soir, Sorina se retrouva à courir au cœur d’une sombre forêt, poursuivie par les gens du village aux alentours. Ce jour-là, les villageois lui avaient refusé l’aumône à cause de son apparence déguenillée et pour ne pas mourir de faim, elle avait dû se résoudre, le cœur gros, à voler du pain à la tombée de la nuit. Malheureusement, elle avait été surprise par des hommes qui s’étaient aussitôt mis en chasse, désireux de lui donner une bonne leçon. Sorina courut longtemps, terrifiée, ses pieds nus s’écorchant contre les racines des arbres. Même lorsqu’elle abandonna le sac de pain à ses poursuivants, ceux-ci continuèrent à lui courir après, torche à la main, déterminés à la brûler par le feu pour expier son péché. Finalement, alors qu’elle pensait être perdue, la princesse arriva devant un immense portail en fer forgé derrière lequel se trouvait une immense demeure aux murs couverts de lierres. S’agrippant au barreau, elle se mit à implorer miséricorde au propriétaire des lieux : - Qui que vous soyez, j’implore votre grâce ! Sauvez-moi de ceux qui me veulent du mal ! La jeune fille manqua de trébucher lorsque le portail s’ouvrit brusquement, lui laissant le passage libre, avant de se refermer derrière elle, la séparant de ses agresseurs par le fer menaçant. Ceux-ci poussèrent des cris de dépit avant de finalement faire demi-tour, sachant qu’ils ne pourraient pas entrer de force sur les terres du mystérieux domaine. Entre-temps, Sorina s’était relevée avec difficulté et s’avançait à présent vers le manoir, lentement, les pieds en sang. Le souffle court, elle arriva devant la porte de la demeure et s’effondra à genoux sur le seuil, épuisée. Elle n’eut même pas la force de frapper à la porte, son ventre grondant douloureusement de faim. Cependant, et à sa grande surprise, la porte s’ouvrit d’elle-même et dans la pénombre, la princesse distingua la silhouette d’un homme qui semblait avoir à peu près son âge. Elle ne put s’empêcher de trembler en voyant deux yeux rougeoyants plonger silencieusement dans les siens, mais elle se rassura du mieux qu’elle put. Après tout, cette personne l’avait sauvée de ses poursuivants en permettant au portail de s’ouvrir… Mais avant qu’elle n’ait le temps de dire quoi que ce soit, la princesse Sorina perdit tout à fait connaissance, par la fatigue, la faim et le froid. Elle eut tout juste le temps de sentir des mains froides la soutenir pour éviter qu’elle ne tombe au sol. Puis, elle sombra dans le noir… Le lendemain matin… La Belle de Transylvanie s’éveilla en sursaut dans un lit moelleux et richement orné. Surprise, elle regarda autour d’elle pour voir où elle se trouvait : elle constata rapidement qu’elle était dans une chambre à la magnificence digne de la princesse qu’elle était. Sortant avec précaution des draps, elle se leva de son lit et explora avec précaution ce qui ressemblait à des appartements. “Tout cela… Est-ce pour moi ?” s’interrogea intérieurement Sorina, n’ayant pas vu tant de luxe dans un même lieu depuis bien longtemps. Ses soupçons se confirmèrent lorsqu’elle vit écrit sur la porte de la chambre : Appartements de la princesse Sorina. “L’homme qui m’a recueilli hier soir sait donc qui je suis ! comprit la jeune fille, le cœur battant. Mais comment m’a-t-il reconnue ? Partout où je suis passée dans le pays, personne n’a su la vérité sur moi…” Secouant la tête, Sorina explora un peu sa chambre et fut ravie en découvrant la bibliothèque, le clavecin et les quelques livres de musique qui ornaient la pièce. - Mon sauveur tient peut-être à ce que je puisse me distraire…, songea la princesse à haute voix, à la fois perplexe et enchantée. S’approchant de la bibliothèque, elle vit un livre sur lequel un message était inscrit en lettres d’or : Souhaitez et commandez : vous êtes ici la maîtresse et la reine du manoir. Le premier étonnement passé face à cette note, la tristesse vint brusquement envahir la jeune fille : - Hélas ! La seule chose que je souhaiterais ici et maintenant est de savoir comment vont mes frères. Je suis partie depuis si longtemps qu’ils m’ont sans doute oublié ! Aussitôt, une lumière dorée illumina le grand miroir de l’armoir à vêtement et Sorina ne put retenir un halètement en voyant la glace qui lui montrait la salle du trône du château de Transylvanie. Dans la pièce se tenaient les princes Aurel et Oscar, près du roi et de la reine. Malgré leurs visages calmes, presque indifférents, une profonde tristesse persistait dans leurs yeux et Sorina crut entendre leurs pensées de lamentation envers leur petite sœur perdue. Finalement, tout cela disparut et la princesse songea que son protecteur devait disposer de biens étranges pouvoirs pour avoir permis un tel miracle. Tout en se vêtissant d’une des robes que disposait l’armoire, elle se demanda quand elle le reverrait. Après avoir passé quelques heures à lire de bons livres et à jouer du clavecin, Sorina s’enhardit à visiter le manoir dont elle admira la beauté, alliée à la robustesse. Dans la salle à manger, elle fut étonnée de voir la table mise pour une personne, bien qu’elle n’avait croisé aucun serviteur dans les couloirs. La faim l’emportant sur les interrogations, la princesse mangea le délicieux repas avant de reprendre son exploration. Lorsque le soir tomba, Sorina se rendit à nouveau dans la salle à manger où elle trouva le couvert installé pour deux personnes. À peine fut-elle assise sur sa chaise qu’elle vit une silhouette masculine arriver en face d’elle : la jeune fille reconnut l’homme qui l’avait sauvé tantôt et ne put retenir un nouveau frémissement à la vue de ses yeux rouges inquiétants. - Princesse Sorina, lui dit le comte Dracula - car c’était bien lui - me permettez-vous que je me joigne à vous pour le dîner ? - Bien entendu, répondit-elle en tremblant. Après tout, vous êtes le maître des lieux. - Non, répliqua doucement le jeune homme. Il n’y a ici de maîtresse que vous, chère princesse. Et si jamais je vous ennuie, vous n’aurez qu’à me dire de m’en aller et je sortirai tout de suite. En la voyant hocher la tête silencieusement, incapable de répondre, le comte s’inquiéta : - Dites-moi princesse, je suppose que je dois vous faire peur, n’est-ce pas ? - Cela est vrai, admit Sorina qui était incapable de mentir. Cependant, vous m’avez sauvée la vie, hier soir, en me recueillant parmi vous. Pour moi, vous êtes bien la seule personne à l’âme généreuse que j’ai rencontrée depuis le début de mon périple. - J’imagine que vous avez raison, répondit Dracula. Cependant, outre le fait que je sois effrayant, je n’ai point non plus d’esprit. En vérité, je ne suis qu’un sot sans grande valeur… - Je ne suis pas d’accord, répliqua la jeune fille avec fermeté. On n’est pas un sot lorsqu’on croit n’avoir aucun esprit : un idiot est incapable de concevoir une telle pensée. Face à ce compliment déguisé, le comte sentit le rouge monter à ses joues pâles et il détourna le visage pour que sa convive ne remarque rien : - Mangez donc, princesse Sorina. Sachez que vous pouvez vous considérer comme mon invitée, aussi longtemps qu’il vous plaira de rester ici. J’espère que vous ne vous ennuierez jamais : j’aurais bien de la peine à vous voir malheureuse. - Vous êtes quelqu’un de bien, lui assura Sorina en souriant. Vous êtes bien la seule personne qui ait montré de la compassion pour moi, excepté mes deux frères. Et quand je vous regarde plus attentivement, vous ne me faites plus autant peur qu’auparavant. - Oh, je suis sans doute quelqu’un de bien…, admit le jeune homme avec tristesse. Mais malgré tout, je suis un monstre. - Il existe des hommes bien plus monstrueux que vous, objecta la Belle de Transylvanie. J’ai rencontré beaucoup de personnes au cœur sec et difforme depuis que j’ai quitté le château. Si vous ne m’aviez pas accueilli parmi vous, je pense que j’aurais cessé de croire en la bonté de l’âme humaine. - Votre gentillesse me va droit au coeur, lui avoua Dracula. Si j’avais un peu plus d’esprit, je ferais un grand compliment pour vous remercier. Mais comme je suis stupide, je ne peux que vous dire que je vous en sais gré. Sorina se contenta de sourire et de continuer à souper de bon appétit. Le comte ne lui faisait presque plus peur maintenant, malgré ses étranges yeux rouges. Pourtant, elle manqua de mourir de frayeur lorsqu’il lui posa cette question à la fin du repas : - Princesse Sorina, voulez-vous m’épouser ? D’abord tétanisée à l’idée de le mettre en colère, la jeune fille finit par secouer la tête et lui répondit non avec honnêteté. Le pauvre homme poussa alors un long soupir, si fort que les murs du domaine semblaient en trembler. Finalement, la peur de Sorina se calma lorsque le comte lui souhaita une bonne nuit avant de se retirer de la pièce. Une fois seule, la princesse se plongea dans ses pensées : “Je suis bien navrée de lui avoir causé de la peine…, songea cette gentille fille avec compassion. Quel dommage qu’il soit si effrayant, il est si bon avec moi !” À partir de ce jour-là, la princesse Sorina demeura chez le comte Dracula, les jours et les nuits s’écoulant avec tranquillité. Elle eut plaisir à ne plus souffrir de la faim, du froid et de la peur qu’elle avait souvent éprouvés durant son voyage dans les différentes régions de son royaume natal. Elle se surprit même à apprécier de nouveau les avantages que lui offrait une vie luxueuse, comme les belles toilettes et les divertissements musicaux qu’elle avait pourtant failli prendre en horreur lorsqu’elle était encore une princesse. Peu à peu, la jeune fille s’habitua également à la présence du comte Dracula à ses côtés, que ce soit pour les repas ou pendant les promenades dans les beaux jardins du manoir. Bien qu’il se définissait comme n’ayant aucun esprit, le comte possédait néanmoins suffisamment de bon sens pour mener des conversations assez agréables avec sa convive. Bientôt, celle-ci s’accoutuma à la vue de son sauveur et se mit à chérir davantage tous les bons moments qu’ils passaient ensemble, comme les nouvelles bontés qu’elle lui découvrait chaque jour. Sorina ne tarda pas non plus, un soir, à trouver le courage nécessaire pour lui demander la raison de l’étrange couleur de ses yeux. Dracula lui raconta alors la malédiction qui pesait sur lui, à cause de cette méchante fée qui désirait l’épouser et qu’il avait rejetée. La seule chose qu’il garda sous silence était le moyen pour briser la malédiction, ne souhaitant pas que la douce Sorina se sente obliger de l’aimer pour l’aider à mettre un terme au sortilège. - Et donc…, lui demanda la jeune fille avec hésitation. Est-ce que vous buvez… du sang ? - Seulement du sang animal, la rassura le comte. Et comme je chasse uniquement dans les bois de mon domaine, personne n’a jamais soupçonné l’existence d’une créature de la nuit. Sinon, il est certain qu’on viendrait à moi pour me mettre à mort ! La princesse fut étonnée de sentir un frisson la parcourir à l’idée que son bienfaiteur puisse être mis à mort d’une façon aussi cruel alors qu’il possédait une âme des plus bienveillantes. Elle comprit également d’où venait l’étrange pâleur du jeune homme ainsi que ses yeux rougeoyants : c’était à cause de sa condition de vampire, le sang ayant changé la couleur du regard de Dracula, anciennement bleu. En fait, la seule chose qui chagrinait véritablement Sorina était que le comte lui demandait toujours à la fin de chaque souper si elle voulait l’épouser, et paraissait pénétré de douleur à chaque fois qu’elle lui répondait non. Même si elle éprouvait de tendres sentiments envers lui, la Belle de Transylvanie ne pouvait se résoudre à devenir la femme d’un vampire : qui sait s’ils ne deviendraient pas malheureux une fois ensemble ? Trois mois plus tard… Ce jour-là semblait être une journée comme les autres pour la princesse Sorina. Pourtant, quelque chose ne tarda pas à l’inquiéter : contrairement à d’habitude, le comte n’était pas venu la voir. Soucieuse, la jeune fille décida de se rendre à ses appartements pour voir s’il allait bien. Lorsqu’elle eut ouvert la porte de sa chambre, Sorina fut choquée par ce qu’elle vit : Dracula était allongé sur son lit, le visage gris comme la cendre au lieu de sa pâleur habituelle. Elle se précipita aussitôt à son chevet, le regard inquiet : - Comte ! Que vous arrive-t-il ? Êtes-vous malade ? - Non princesse…, répondit faiblement le jeune homme. La chasse a été infructueuse aujourd’hui… et je n’ai pas pu me nourrir… Sorina comprit aussitôt ce que sous-entendait le vampire à travers ses paroles et serra sa main dans les siennes. - Puis-je faire quelque chose pour vous ? lui demanda-t-elle, prête à lui venir en aide. - Il n’y aurait qu’une seule chose à faire…, répondit Dracula dans un soupir. Je sais d’avance que cela vous déplaira, mais s’il vous plaît… Princesse Sorina… Laissez-moi boire un peu de votre sang… ! Au son de cette faveur, la jeune fille haleta d’abord de peur, craignant les conséquences d’une morsure sur sa personne. Mais ensuite, en voyant l’expression douloureuse du comte qui paraissait proche du trépas - malgré sa condition d’immortel - elle ne tarda pas à prendre une décision et tendit son poignet vers son protecteur. Au comble de la soif, Dracula approcha ses lèvres de la peau fine de Sorina puis la mordit d’un coup sec, ses canines pénétrant sa chair. Sous l’effet de la douleur, la princesse sursauta et gémit tout bas. Néanmoins, elle laissa le comte s’abreuver de son sang et fut soulagée en le voyant retrouver sa pâleur habituelle. Mais lorsqu’il relâcha son étreinte sur son poignet, une faiblesse inattendue envahit la jeune fille et elle s’évanouit. À son réveil, dans ses propres appartements, le comte Dracula lui expliqua que c’était l’effet de la morsure qui l’avait conduite dans cet état. Heureusement, elle n’eut d’autre séquelle de son geste qu’une simple morsure en forme de demi-lune argentée sur le poignet. Trois jours plus tard… D’étranges rumeurs à propos de la famille royale de Transylvanie avaient commencé à circuler à l’est du pays et finirent par arriver aux oreilles de Sorina et du comte. Celle-ci utilisa alors son miroir magique dans sa chambre pour vérifier la véracité des faits et les rumeurs s’avérèrent vraies : le roi, son père, venait de mourir et avait transmis sa couronne à son fils aîné, le prince Aurel. Dans un soupir, la princesse songea à ses deux frères qu’elle n’avait pas vu depuis fort longtemps : elle brûlait de désir de les revoir. Et puis, elle était aussi curieuse de savoir comment son absence avait touché le royaume ainsi que sa mère, la reine. Le soir venu, la jeune fille demanda donc au comte Dracula la permission de retourner au château, le temps de retrouver sa famille. Le souhait de sa protégée étonna le comte autant qu’il le troubla : - Pourquoi voulez-vous retourner parmi eux ? J’avais cru comprendre que vous étiez fort malheureuse lorsque vous étiez une princesse… Alors pourquoi revenir à leurs côtés ? - Certes, mes parents se montraient souvent injustes avec moi, admit Sorina, les mains jointes en signe de prière. Mais je suis une princesse et en tant que telle, je me dois de rendre mes derniers hommages à mon père, le roi. Je tiens également à revoir mes frères, Aurel et Oscar : je ne les ai plus vus depuis si longtemps que je mourrai de douleur si vous me refusez le plaisir d’être à nouveau auprès d’eux. Face à ce discours, le comte hocha tristement la tête : en vérité, il préférerait mourir lui-même plutôt que de causer du chagrin à celle qu’il aimait en secret. - N’ayez crainte, douce Sorina. Je vous accorderai les moyens nécessaires pour rentrer chez vous. Quant à moi, une fois que vous serez partie, je replongerai dans ma solitude d’antan, ajouta-t-il avec mélancolie. - Ne tenez pas de tels discours, insista la jeune fille en prenant ses mains dans les siennes. Je ne peux me résoudre à vous abandonner complètement : laissez-moi huit jours avec ma famille ensuite, je reviendrai auprès de vous. Comme je n’ai jamais eu beaucoup d’utilité en tant que princesse, mes frères accepteront certainement de me laisser vivre à vos côtés, dans l’est du pays. La résolution de la princesse semblait si franche et sincère que Dracula finit par céder à ses avances. Il lui promit que dès qu’elle sera couchée, le lendemain, elle s’éveillerait dans le château familial. Il lui donna également un anneau qui aurait le pouvoir de la faire revenir au manoir quand elle le souhaiterait. Enfin, il lui fit une dernière recommandation : - Ne parlez à personne de ma condition de vampire, même à votre entourage proche. Quant à votre cicatrice au poignet, cachez-là de la vue de tous : personne ne doit vous poser de question sur son origine. La princesse Sorina lui promit tout cela et sur ces termes, le couple se sépara. Le comte s’en alla en soupirant comme à son habitude tandis que sa convive se sentit affligée de lui causer une telle tristesse. Lorsqu’elle se coucha, elle se renouvela la promesse de revenir auprès de Dracula, une fois les huit jours passés, et de ne parler de son état à quiconque. Le lendemain matin… Ce fut les premiers rayons du soleil qui éveillèrent la Belle de Transylvanie, à l’aube revenant. Elle vit tout de suite qu’elle était dans le château familial et attrapant une clochette se trouvant à côté de son lit, elle la sonna pour faire venir une servante à elle. Le cri de stupeur que poussa celle-ci attira l’attention d’Aurel et Oscar, les frères de Sorina : ils manquèrent de s’évanouir de joie en constatant le retour de leur petite sœur chérie, et tous s’enlacèrent dans une étreinte joyeuse qui dura de longues minutes. Après ces premiers transports, la princesse songea qu’elle n’avait aucune robe à porter pour pouvoir s’habiller convenablement. Mais la servante l’avertit qu’elle venait de trouver un coffre rempli de toilettes aux tissus chatoyants, couvertes de diamants et de rubis. Sorina devina que ce prodige était lié au comte et lui adressa une prière muette de remerciement. Un peu plus tard, l’ancienne reine de Transylvanie, la mère d’Aurel, d’Oscar et de Sorina, vint à son tour à la rencontre de sa fille et pensa mourir de douleur et de jalousie en la voyant aussi somptueusement vêtue, toujours aussi belle qu’autrefois. Inexplicablement, cette femme avait toujours eu le coeur mauvais envers sa dernière enfant qu’elle considérait comme un fardeau et sa disparition soudaine, trois mois auparavant, l’avait réjouit. Maintenant qu’elle était de retour, la souveraine entreprit de la surveiller avec attention, espérant trouver un moyen de lui nuire. Finalement, la reine-mère ne tarda pas à découvrir que Sorina s’efforçait toujours de cacher curieusement son poignet droit avec la manche de sa robe. Emplie d’un intérêt malsain, elle attendit le bon moment pour agir et le soir venu, alors que sa fille discutait tranquillement avec ses frères dans ses appartements, elle lui tourna autour de façon discrète, prête à dévoiler le secret que Sorina tentait de cacher. A un moment donné, la jeune fille tira à nouveau sur sa manche et l’ancienne reine lui attrapa le poignet par surprise, exposant rapidement sa cicatrice d’un argenté brillant à la vue de tous. - Qu’est-ce que c’est que cela ? l’interrogea-t-elle sévèrement tout en lui tenant le bras. De quelle manière t’es-tu blessée pour en avoir gardé une telle marque ? Au début, fidèle à son serment envers son ami, la princesse refusa de parler et demeura silencieuse, malgré la surprise qu’elle vit peinte sur le visage de ses frères. Cependant, sa mère se mit à la tourmenter tant et si bien que Sorina, épouvantée, finit par révéler son secret sur la nature du comte Dracula. En apprenant cela, la reine-mère se mit dans une telle colère qu’Aurel, nouveau roi du pays, dû l’emmener de force dans une autre pièce pour la calmer. Pendant ce temps, le prince Oscar s’efforçait de consoler sa petite sœur qui avait éclaté en sanglots, honteuse d’avoir rompu une promesse solennelle auquelle elle s’était pourtant engagée. - Pourvu qu’il ne lui arrive rien de mal par ma faute ! pria-t-elle à haute voix entre ses larmes, les mains jointes. Un peu plus tard dans la nuit, retirée dans ses appartements, la malveillante reine-mère appela à elle quelques-uns de ses plus fidèles serviteurs pour leur confier une mission de toute urgence : tuer la maudite créature de la nuit qui hantait l’est du pays. - Le comte Dracula a déjà bu le sang de ma fille, alors pourquoi ne recommencerait-il pas ? Vous devez absolument me débarrasser de cette nuisance avant qu’il ne puisse agir, peu importe les sentiments que ma fille éprouve pour lui. - Comment devrons-nous le tuer, Majesté ? lui demanda l’un de ses serviteurs, perplexe. Après tout, les vampires ne sont-ils pas censés être immortels ? - Certes, il n’existe qu’une seule façon pour les tuer, admit l’ancienne reine en tendant un objet pointu vers ses hommes. Il faut leur enfoncer un pieu en bois dans le cœur : prenez celui que je vous donne et partez accomplir votre devoir. Surtout, soyez prudent : ce comte ne se laissera pas tuer sans se battre jusqu’à la dernière extrémité. Sur ces avertissements, les fidèles de la reine-mère quittèrent le château en secret, se rendant dans l’est du pays pour aller exécuter leur sale besogne. Une semaine plus tard… Couchée dans le lit de sa chambre, Sorina se tournait et se retournait sous ses draps en velours, agitée par des sentiments contradictoires. D’un côté, elle était heureuse d’avoir retrouvé ses frères et leur amitié fraternelle d’antan. Elle avait même réussi à convaincre Aurel, désormais son roi, d’accentuer davantage l’importance sur les lois de l’hospitalité dans la Transylvanie, lui ayant raconté ses expériences malheureuses durant son exil. De cette façon, les étrangers seraient accueillis bien plus amicalement dans le pays. Le royaume aussi avait célébré le retour de leur princesse bien-aimée par les siens : la Belle de Transylvanie faisait à nouveau le bonheur du peuple lorsqu’elle se promenait en carrosse avec ses frères dans le village environnant. Mais d’un autre côté, Sorina était déçue de voir que sa mère n’avait pas du tout changée depuis son départ et était resté la femme froide et égoïste de ses souvenirs. Cependant, ce qui l’ennuyait réellement, c’était le chagrin que lui causait l’absence du comte Dracula, si loin d’elle. Le jeune homme lui manquait beaucoup et elle ne pouvait s’empêcher de se faire des reproches en songeant à la peine qu’elle lui provoquait par leur séparation. Cette nuit-là justement, alors que les huit jours arrivaient à leur terme, la princesse fit un rêve étrange et effrayant : elle vit le manoir du comte et un groupe d’hommes vêtus aux couleurs de la famille royale se faufiler dans le hall. L’instant d’après, Sorina observa le combat qui opposait Dracula à ses adversaires. Son visage était empreint d’une incroyable férocité mais aussi de peur face à un redoutable pieu en bois. Soudain, la Belle de Transylvanie crut voir les yeux rougeoyants et désespérés du comte plonger dans les siens, l’éveillant en sursaut. Elle commença alors à se lamenter : - Insensée que je suis ! N’ai-je pas été déloyal envers cet homme bon et bienveillant en dévoilant son secret à ma mère ? Car je n’en doute pas : c’est elle qui a envoyé ces hommes pour tuer le comte. Allons, il ne faut pas m’attarder davantage ici : je dois le sauver tant qu’il est encore temps. Sur ces belles paroles, la princesse Sorina se leva et attrapa l’anneau magique que le comte Dracula lui avait donné avant son départ. A peine l’eut-elle mise à son doigt qu’elle disparut du château dans une lueur dorée. Lorsqu’elle réapparu, quelle ne fut sa joie de constater qu’elle était revenue au manoir enchanté ! Soudain, des cris et autres hurlements lui parvinrent à l’oreille, lui glaçant le sang. Mais elle reprit rapidement courage : - Non, cela ne sert à rien de rester ici : je dois aller voir ce qu’il se passe. Vêtue simplement de sa longue chemise de nuit blanche, Sorina sortit de la pièce et se précipita en direction du hall. En haut des escaliers, elle eut finalement un aperçu du carnage qui avait eu lieu, quelques minutes avant son arrivée : tous les hommes envoyés par la reine-mère étaient morts, des blessures sanglantes partout sur leur corps et des trainés de sang souillant le sol en marbre blanc. Dans un frisson, la princesse regarda les escaliers et poussa un cri d’horreur et de détresse : le comte était effondré sur les premières marches, le pieu enfoncé dans sa poitrine. Courant comme une folle au risque de faire une chute, Sorina se précipita sur le jeune homme, jetant son corps contre le sien et ce, sans éprouver la moindre peur sur son apparence ou sur le sang qui venait tacher ses habits. Très vite, cependant, la jeune fille constata qu’il était encore en vie et rapprocha sa tête contre sa poitrine pour pouvoir lui parler plus facilement. Dracula ouvrit alors les yeux et s’adressa faiblement à la princesse : - Ces hommes ont été envoyés par votre mère… À travers ma mort, c’est à vous qu’elle voulait faire du mal… en vous privant de votre seul véritable ami… Je me meurs mais au moins… je meurs heureux puisque j’ai eu le bonheur de vous revoir… - Non cher comte, vous ne mourrez point, lui assura Sorina, pourtant sur le point de défaillir. Au contraire, vous vivrez et deviendrez mon époux. Oui, vous êtes effrayant et vous avez peu d’esprit, mais cela n’importe plus pour moi : ce n’est ni l’apparence, ni l’esprit d’un homme qui peuvent rendre une femme heureuse, mais la bonté de son caractère et sa vertu. Heureux d’entendre de si douces paroles malgré sa douleur, le comte ferma paisiblement ses yeux, laissant les ténèbres l’envahir peu à peu. Au comble de l’angoisse, la princesse Sorina le serra plus fort contre elle et se mit à crier : - S’il vous plaît, demeurez à mes côtés ! Je jure de vous accorder ma main et d’être vôtre à tout jamais ! J’ai toujours pensé n’avoir que de l’amitié pour vous mais à présent, je me rends compte que la vie n’a plus d’importance pour moi si vous n’êtes pas à mes côtés ! Les larmes coulant doucement sur ses joues, la Belle de Transylvanie rapprocha le visage de son amant et déposa un chaste baiser sur ses lèvres avant de murmurer dans un sanglot : - Je vous aime… À peine eut-elle dit ces mots qu’un miracle se produisit : le corps du comte Dracula se mit à scintiller de mille feux, tout comme le manoir et ses jardins. Eblouie, Sorina ferma les yeux et lorsqu’elle pu les rouvrir, elle fut stupéfaite de constater que toutes les blessures de l’homme qu’elle aimait avaient disparu, tout comme le pieu en bois. Plus surprenant encore : Dracula avait perdu son apparence vampirique et semblait avoir retrouvé son humanité. - Comte ? Que vient-il de se passer ? l’interrogea-t-elle alors que la demeure semblait à présent nimbée de lumière. - Chère Sorina, lui répondit tendrement le jeune homme en prenant ses mains dans les siennes. Vous venez de me sauver de la malédiction qui me rongeait depuis si longtemps. La fée qui m’avait jeté ce sort m’avait condamné à rester un vampire et m’avait défendu de faire paraitre mon esprit jusqu’à ce qu’une femme humaine tombe amoureuse de moi. Vous seule avait été touchée par mon caractère au-delà des apparences. En vous offrant mon amour, j’espère m’acquitter de tous les bienfaits que vous m’avez accordés. Agréablement surprise par cette révélation, la princesse se blottit contre son bien-aimé et ils demeurèrent longtemps enlacés, heureux du destin favorable qui les attendait. Le lendemain matin, le couple retourna au château pour y exposer, devant toute la cour, la vérité à propos de l’enchantement pesant sur le comte, ainsi que le sombre complot ourdi par l’ancienne souveraine de Transylvanie. D’abord stupéfait puis indigné, le roi Aurel ordonna l’arrestation de sa mère avant d’accueillir de bon cœur le comte Dracula comme le fiancé de sa sœur. Peu de temps après, la reine-mère fut jugée et condamnée à mort par décapitation pour trahison et tentative de meurtre sur l’un des pairs du royaume. De son côté, la princesse Sorina demeura quelques semaines au château où elle épousa son très cher comte lors d’une cérémonie fastueuse. Le roi, son frère, lui accorda le privilège de garder son titre de princesse en plus de son nouveau rang de comtesse, offrant ainsi à Dracula le titre de prince consort de Transylvanie. Cependant, les deux époux ne restèrent pas longtemps à la cour et finirent par se retirer dans le manoir du comte, théâtre de la naissance de leur amour. Cela n’empêcha pas Sorina de rester en bonne intelligence avec ses frères, leur rendant visite chaque fois que sa présence était réclamée. Néanmoins, elle était toujours heureuse de regagner le manoir qu’elle considérait désormais comme sa véritable maison. Toute royale qu’elle fut, la princesse Sorina eut la chance d’avoir un mariage long et heureux avec son comte bien-aimée car leur bonheur fut fondé sur la vertu et la bonté.

  • Trois mots vagabonds - PPL FABLI

    Consigne : Écrivez un texte de la forme de votre choix sur la citation suivante : « La parole doit sortir du cœur et non de la bouche » Colette Magny Ma bouche est-elle donc si cruelle De ne pas oser t’avouer mon amour ? Blondeur des blés et bleu des cieux Comme si cela m’importait tant… Je n’ai pas besoin de tes yeux Mais de tes mots, ta voix seulement. Et que penser de ce silence Qui doit te paraître bien froid Qui dit cependant ma méfiance À l’égard de l’Amour et ses lois ? Peut-être m’en veux-tu, peut-être Aurais-je dû prononcer ces trois Mots vagabonds qui unissent deux êtres Qui s’aiment – ou bien le croient. Ma tête est-elle donc si sadique Pour me tourmenter nuit et jour ? Ces sentiments passeront sans doute Je me tracerai une nouvelle route C’est peut-être le temps d’un été, …Ou peut-être d’une éternité ? Et si tu ne m’aimais plus Que le charme était rompu Qu’il n’y avait pas d’avenir commun …Mais peut-être y en a-t-il un ? Je ne sais plus à qui me fier Dans ce tourbillon insensé De questions, de doutes et de peurs ; À ma tête, à ma bouche… à mon cœur ? Mon cœur saurait te dire mieux que quiconque Ce qu’il se passe quand je t’entends. C’est l’océan de tes paroles Qui m’inonde et me fait oublier Tout, de mes gestes à mes pensées ; Mon âme et tout mon corps s’envolent. C’est ta voix si envoûtante Si chaleureuse, si délicieuse Un joyau, une pierre précieuse Qui m’attire tant et qui me hante. S’il te plaît, reçois ce poème Comme un gage de mon admiration Comme le fruit de ma passion Car de tout mon cœur…je t’aime.

  • Correspondance ratée - PPL FABLI

    Lauréate du Petit Prix Littéraire FABLI 🏅 Consigne : Écrivez un texte de la forme de votre choix sur la citation suivante : « La parole doit sortir du cœur et non de la bouche » Colette Magny Lucas, 18h37 : Salut Lara ! J’ai encore ton CD au fait ! Tu l’avais oublié l’autre soir. Lucas, 19h45 : Je n’ai pas pu m’empêcher d’écouter. Je ne pensais pas que c’était aussi bien pour une artiste de ce temps-là. « Melocoton », « Les Tuileries »… C’est génial ! Lucas, 20h38 : Mais… c’est quand même déroutant… « La parole doit sortir du cœur et non de la bouche ». Ça me préoccupe… Lucas, 21h59 : J’écoute cette dame en boucle. Colette Magny. Comme tout le monde, je la crois dépassée, d’un autre temps. Mais ce qu’elle chante avec tant de passion ne peut qu’être vrai. Cette phrase tourne en boucle dans ma tête depuis des heures, « La parole doit sortir du cœur et non de la bouche. ». Elle en dit tant sur notre société. On parle beaucoup par SMS, par téléphone, par les réseaux sociaux. On vit dans une véritable société de communication constante. On ne doit que liker, partager, zapper et mater pour plaire à tout le monde. On veut aller vite, trop vite. On cherche. On se fend dans la masse, on se gave d’info ou d’intox. Peu importe ce que l’on pense, peu importe ce que l’on est. On est pris dans le moule, inexorablement. On se croit exister et en fait, non c’est tout le contraire. C’est dur de voir que l’homme d’aujourd’hui n’est que du vide. On parle sans vraiment parler. C’est toujours au nom de la collectivité. Le poids des autres nous oblige à taire ce que nous avons sur le cœur. Je veux penser, je veux « être », tout simplement. Lucas, 22h35 : Ça m’obsède… Il faut que je te dise quand même. J’ai ça sur le cœur. Je t’ai menti. Des filles comme toi, il n’y en a pas deux. Quand je te vois avec tes longs cheveux d’or, je me dis que tu restes mon unique richesse. Je rêve de toi à chaque instant. Je ne saurai pas expliquer. Je veux que tu sois mon tout. Parler… Parler, ce n’est pas agir. Comment un homme peut-il rester indifférent à ton regard de braise, cette grâce de déesse ? C’est peut-être stupide, peut-être fleur bleue… Mais je veux être heureux à tes côtés. T’écouter rire, me raconter tes journées. On est peut-être trop jeunes, mais au fond, doit-on attendre ? Doit-on réagir en fonction d’une société trop bavarde mais passive ? Doit-on cacher ce qu’on a sur le cœur ? Lucas, 23h26 : Mon père disait souvent que ce qui sort de la bouche n’est que mensonge et folie. Tout ce qui sort du cœur est vrai, sans alentour. Je ne pense pas être le meilleur mais je sais que tu es la seule pour moi. Tu es partout. Un amour pur comme celui-là, il n’en existe pas. Balzac disait : « Mon père m’a donné un cœur, mais vous l’avez fait battre. ». Oui, je sais, Le Père Goriot. Ton roman préféré. Mais tu dois dormir. Je vais donc rêver de toi, ma belle ingénue. Ta voix est la plus douce des chansons. Numéro Inconnu, 8h09 : Salut Cyrano, tu t’es trompé de numéro. Ne t’en fais pas, ta copine ne le saura pas !

  • Psyché - PPL FABLI

    Lauréate du Petit Prix Littéraire FABLI 🏅 Consigne : Écrivez un texte de la forme de votre choix sur la citation suivante : « Nous traversons le présent les yeux bandés. » - Milan Kundera – Je suis tombé dans la piscine. – Il n’y a pas de piscine, papa. Il y a un homme en face de moi. Une quarantaine d’années, l’âge de mon fils. Je ne le connais pas, alors pourquoi est-il là, avec moi ? Pourquoi me parle-t-il ? Me contredit-il ? Je me souviens de l’eau, je ne me souviens que de cela. – Qui êtes-vous déjà ? – C’est moi, papa. Ton fils, Philippe. Il est gentil de venir me voir. Je vis seul depuis qu’elle est partie. Je me souviens d’elle. Sa photo est accrochée sur le mur, au-dessus de l’aquarium. Je dois nourrir les poissons tous les matins. Ils tournent, tournent dans leur bocal. J’espère qu’ils n’ont pas mal à la tête. Ils n’ont pas faim, je les nourris tous les matins. – Ah Philippe. C’est gentil de venir me voir. Ta mère sera contente. – Papa, maman n’est plus là. Elle est morte il y a deux ans, tu te souviens ? – Je suis tombé dans la piscine. Les autres enfants crient et courent tout autour de moi qui avance à tâtons, les bras tendus et le visage tordu par le foulard noué à l’arrière de mon crâne et j’essaye désespérément de toucher quelqu’un, de reconnaître quelqu’un pour laisser mon tour à un autre. C’est le jeu. Les parents se réunissent autour d’un café et de chocolats pendant qu’ils envoient leurs rejetons jouer dans le jardin. L’aîné m’a désigné comme le premier aveuglé, depuis, les par là et les par ici m’encerclent. J’avance par là. Une voix, attention c’est dangereux. Ils l’occultent, alors j’avance encore et je trébuche dans le grand bain de la vie. Les éclats de rire se déploient de leur gorge à mes tympans. Je suis tombé dans la piscine. Je ne me souviens pas pour quelle occasion nous sommes tous attablés devant nos assiettes. Quel jour sommes-nous ? Ma femme n’est pas là, je ne la vois pas. Mais les deux fillettes en face ont son menton et les yeux de l’homme qui me ressert une part de tarte possèdent la même nuance de bleu ciel que ses iris. Ils doivent être de sa famille ; de ma famille. Un bourdonnement dans mon cerveau m’empêche de me concentrer. Je me pince l’arrête du nez. Les discussions et les rires sont trop forts, trop flous. Je plane, le décor devient duveteux comme si je flottais dans un nuage mais ce n’est pas doux. – Ça va, papa ? L’homme aux yeux bleus pose sa main sur mon épaule mais je ne la sens pas. Je perds le contact avec mon corps. – Papa ? Papa ? Réponds, papa. Il me parle, je dois répondre. J’en suis incapable. Les conversations se sont tues. – Chérie, appelle le Samu, vite. Maintenant ! Papa, reste avec nous. Les secours arrivent. Reste avec moi, papa. Il a les même yeux qu’elle. C’est la première fois que je vais m’envoler. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, dans mes tempes, partout sur ma peau pendant que le sang flue et reflue dans mes artères avec de plus en plus d’intensité en signe de vie et de panique. J’étale dans mon esprit des arguments scientifiques comme des feuilles griffonnées éparpillées sur un parquet. Et comme je préfère fermer les yeux sur la réalité, j’enfile un bandeau en espérant qu’il m’aidera à m’endormir. Mais il me faut aussitôt me lever car ma voisine souhaite rejoindre son siège. Elle rayonne à l’idée de pouvoir poser son front contre le hublot. Son cœur décolle en même temps que le moteur pendant que le mien bat des ailes. Je crois qu’elle est dans ce vol pour que le bleu de ses yeux se dissolve dans celui du ciel. J’agrippe les accoudoirs dans l’espoir qu’ils me retiennent au sol. Ses doigts se posent sur les miens. Nous nous envolons, main dans la main jusqu’à atteindre notre destination finale. Une main s’accroche à mes doigts. Elle est rugueuse comme les miennes quand je travaillais le bois. – Papa… Je peux partir. – Papa, je t’aime. Je vois une lumière comme si je me trouvais au fond de l’eau et que je regardais à la surface. Elle me tire vers le haut. Je vois un soleil. Aveuglant. Crédit photo : David Lorieux

  • Flash-back adolescent

    Écrire une microfiction à partir du tableau de David Hockney Le Parc des Sources, 1970. (consigne de Mme Milena Mikhaïlova) Il y a bien longtemps que je n’y suis plus allée et c’est très certainement par mégarde que je m’y suis retrouvée. J’en avais totalement oublié ces arbres si habilement, justement et droitement plantés et cette herbe verte qu’on vient fraîchement de couper. Les pigeons perchés sur la statue à l’entrée. Ça y est ! Je me souviens! Hasard ou non, c’est le temps lui-même qui m’y a conviée ; revenir et marcher dans ces traces que j’ai autrefois foulées. Comme une promesse silencieuse du passé qu’il me faut à présent réaliser. Je m’engage dans l’allée, allure fluette et petites chaussures d’été. C’est si troublant de constater que rien, non rien n’a changé. Pas même les rayons du soleil à travers les feuilles, ni la course affolée de quelques écureuils. C’est un jour d’été, le même qu’il y a maintenant bien des années. Bourgeons éclos des roses et des lilas, comme le doux parfum de tes draps. Cela aurait pu être beau, si ce souvenir ne m’avait pas rattrapée. Je nous revois nous enlacer devant la fontaine, ton engouement pour essuyer timidement les gouttelettes qui avait parsemé mes joues humidifiées. Puis, le baiser que j’avais osé te voler avant de m’enfuir et de slalomer entre les arbres comme une folle furieuse. Un jeu d’enfant, fuir pour mieux être rattrapée. Et nos rires qui avaient résonné. Je me revoie encore souhaiter que cela dure toute la journée... Je me suis assise sur ces chaises qui nous ont jadis accueillis et ont écouté les confessions que nous nous étions échangées en catimini. Les oiseaux chantent cette même sonate qui nous avait bercées et les enfants jouent avec leurs cerfs-volants fabriqués. Un sourire délicat sur les lèvres, j’accueille cet instant comme un unique, doux mais puissant… — Flash-back adolescent ? J’ai alors relevé mes lunettes de soleil. Aveuglée, j’ai mis quelques secondes à reconnaître que l’enfant en toi a étonnement grandi. J’ai seulement acquiescé, sans l’ombre d’un seul regret tourné vers le passé. Tu t’assieds. Toi aussi tu le sais, que le temps nous rend simplement le rendez-vous que nous avions manqué. Alors délicatement, tu as posé ta paume sur la mienne. Et ensemble, nous avons plongé dans le silence de nos réminiscences.

  • Experience of Pain

    I’ve made the experience of Pain My body is over Although I’m only forty years old But I look awfully older And my brain Is weeping Red tears It’s very painful Like thousands of knives Stuck in my flesh I try to fly away From the runaway train For nowhere But I can’t I can’t I’m locked up into the ruins Of my own downfall It’s pitiful Alcohol and Madness Are stronger than me My feelings are broken As the neck of crows After the battle Then lying on my white bed I crossed your eyes And I’ve seen nothing inside Except compassion But it’s time to go Devil is ahead He places a frozen kiss on my head Don’t be sad Remember that I made the experience of Pain This is the decisive moment To leave my body This is the decisive moment To leave you My Love My Life My Eternity No more pain Please no more pain All my Soul is begging you My cruel Lord But you remain as usually silent While outside is falling the rain Like invisible missiles And I listen with a sudden inner Peace The strange sound Of crows falling on the roof XK (Limoges, le 10.05.22) Crédits : L’Arbre aux corbeaux de Caspar David Friedrich (1774-1840), 1822, huile sur toile, 54 x 71 cm, Musée du Louvre (Paris)

  • Solveig et Vernier

    Écrire une microfiction à partir de la chanson Le Soleil a rendez-vous avec la Lune (version live) de Charles Trenet. (consigne de Mme Milena Mikhaïlova) Solveig claque la porte derrière elle. Tassée dans le réduit, son dos frémit contre la paroi froide. Elle se recroqueville. Ses bras entourent des jambes fébriles d’avoir couru. S’il y avait de la lumière, on y verrait les bleus. Elle tente de calmer sa respiration, de ne pas faire de bruit. Ses yeux s’habitueront mais en attendant elle les ferme et se fait toute petite. Les poumons de Vernier le brûlent, les respirations se hachent et attisent le feu de sa gorge. Il crache mais continue de courir, il accélère même, manquant de renverser une passante au coin de la rue, il bouscule l’étale de l’épicier. Des jurons lui fleurissent aux oreilles tandis que les pommes roulent et s’écrasent sous les roues d’un Scénic, il n’a pas le temps de s’arrêter. On ne saura pas s’il aurait choisi d’aplatir le visage du vendeur sur le goudron ou s’il aurait payé la purée de fruits frais. Vernier ne se retourne pas, il a besoin d’aller plus vite, il regrette de fumer. Elle entend un bruit et arrête complètement de respirer. Le souffle en suspens, elle guette le moindre son. Solveig n’entend que son cœur qui semble avoir décidé de venir se loger tout contre ses tympans. Elle souffle aussi silencieusement que possible, les muscles engourdis de rester prostrée, une douleur aiguë dans la hanche la rattrape à quand elle expire. Elle enfonce les dents dans sa lèvre, au fond, elle sait qu’il arrive, qu’elle ne fait que retarder le moment. Qui a décrété que ce serait aujourd’hui que la rue serait aussi bondée ? Était-il absolument nécessaire que tous les habitants de cette putain de ville choisissent de ne plus prendre la voiture, de délaisser le métro et de rechigner à prendre le bus spécifiquement ce samedi ? Vernier maudit l’écologie et se promet de louer un 4x4 pour ses prochaines vacances. Il sent qu’il ne l’atteindra pas à temps. Son pas ralentit mais vite il se reprend et court de plus belle. Les derniers mètres, elle est au bout de la rue, il la devine à l’angle, un dernier effort et il ouvrira enfin cette foutue porte. Les pas se rapprochent et la course s’arrête. On entend comme un rire et la poignée s’abaisse sous le poids d’une main pressée. La lumière éblouit Solveig qui se sait ainsi découverte. Le choc d’un corps qui lui tombe dessus et son fils qui crie qu’il l’a trouvée, sa peau fragile marquera demain la découverte. Elle le repousse le temps de se déplier, puis l’encercle à nouveau de ses bras, encore à moitié dans le placard. Elle est un peu émue, se rappelle quand elle laissait dépasser ses pieds du canapé et que pourtant il ne la trouvait pas sans qu’elle lui indique s’il était chaud ou froid. Vernier n’a pas pu ouvrir la porte. Une fois en haut des marches, il a continué d’essayer même si sa montre indiquait 19h05, refusant de croire qu’il venait de battre Usain Bolt pour ne pas pouvoir rendre le Beckett que la bibliothèque lui réclame depuis des mois. C’était le dernier jour de la dernière relance et quand il a vu le coin du bouquin dépasser du divan, il a vraiment cru qu’il pourrait échapper aux 20 balles de pénalité. Manqué.

  • Femen

    A mes sœurs Femen Engagées non violentes Et révoltées Comme des hyènes Prêtes au combat Contre l’injustice Le corps dévoilé Et recouvert de slogans Politiques et libertaires Pour mieux crier Mieux se faire entendre Contre des murs dressés Face à l’indifférence Et l’immobilisme Femme fière Et militante Tu veux faire bouger les choses Repousser les murs Comme celui de Berlin avant ça Qui lui aussi a bien fini par tomber Comme la Marianne républicaine Tu t’organises en sororités Actives et réactives Des peintures de guerre Sur ton visage illuminé Te voilà grimée Tu prends le sentier des Amazones Et tu reconquiers à corps et à cris Ta Liberté La couronne de fleurs brûle Dans tes yeux À Inna Shevchenko Qui n’a jamais abandonné la lutte Commencée en 2008 Révolte avortée d’Ukraine Inégalités Trop souvent réprimées Dans la violence Et l’incompréhension Mouvement Femen Qui se répand en France Comme un feu de paille C’est le vent des libertés Qui souffle dessus Avec passion Pancarte de chair Et de sueur Toujours le poing levé Et le cœur qui bat À mes petites sœurs engagées Le visage non voilé De garde à vue En garde à vue D’actions coups de poing Et sextrémistes Vous allez au bout de vos idées Je vous envie Votre combat C’est Poésie Votre combat C’est Idéal Moi à vos côtés Je me ferai Cheyenne Je déterrerai à mon tour la hache de guerre Je ferai danser la pluie Pour inonder nos corps Et nos cheveux De paix De justice Et d’Amour Crédits : La Liberté guidant le peuple (1830) de Eugène Delacroix (1798-1863), huile sur toile, 2,6 x 3,25 m, Musée du Louvre, Paris

  • Atelier des encerclés

    Exercice de style Réécrire un texte en changeant la ponctuation et le sens originel du texte ainsi que la place des mots en utilisant si possible tous les mots et en évitant de les conjuguer différemment : D’abord le long des murs. Ensuite du plafond au sol. La moquette s’est gorgée d’eau, les murs ont gondolé, et, du tapis, des fleurs se sont mises à pousser. Je suis seul et la pluie farine au-dessus de ma tête… (extrait page 8 de Mon ami n’aime pas la pluie de Paul Francesconi, 2015, Lansman éditeur) Texte 1 La moquette le long des murs, du sol au plafond, gorgée d’eau. Ensuite des fleurs ont gondolé et les murs tapis se sont mis à pousser. D’abord, je suis seul, du… Et ma tête s’est farinée au-dessus de la pluie ! XK Kama Datsiottié Texte 2 La moquette du plafond s’est gorgée d’eau. Le long des murs, des fleurs se sont mises à pousser. Les murs ont gondolé — ensuite et d’abord, pluie. Je suis tapis, seul au-dessus du sol, et ma tête farine, au-de-la. Morgane Sarmiento Crédits : Couverture de Mon ami n’aime pas la pluie de Paul Francesconi, 2015, Lansman éditeur

  • Sergi

    Réécrire la microfiction Babylone de Régis Jauffret (consigne de Mme Milena Mikhaïlova) Solitude Tu m’es mère Sans me donner naissance Tu me berces dans le silence Tu me nourris de carence Et tu m’enseignes l’insouciance Quand je ne suis plus qu’ombre D’un chiot qui encombre Espoir Tu me baratines Avec ta silhouette féminine Tu m’offres un toit qui cache la vermine Sur mon corps ta main quasi assassine C’est le piège qui me croque puis se ferme Comment y mettre un terme ? Rage Tu m’es bonne attaque Dans ces combats qu’elle me réclame Sur qui pariera-t-elle quand s’éteindra mon âme ? La Mort ne fait qu’un avec cette femme Pour qui je n’existe que quand il faut payer sa came C’est toi qui m’élances tant que j’ai l’avantage C’est toi qui contrôles quand je déchire son visage Goudron Tu me colles au pelage À chacun de mes passages Sur ton trottoir où la misère voyage Je suis revenu à mon état sauvage Tel que je l’avais laissé moisir N’est neuf que ce qui-vive qui me va à ravir Insécurité Tu m’es coéquipière Quand une main se tend vers moi Ce n’est qu’une caresse mais je déçois Tant tu ne me laisses le choix Parce que tu es cette voix qui aboie : Sergi, ils t’approchent trop Faut que tu montres les crocs !

  • Poetry is not dead

    Poetry is not dead It is all around us It is everywhere Floating in the air As billions of atoms It is like leaves On the branches of trees It is the taste Of our own lives It is a living thing Blowing in the wind During a red and magical season As a movie scene Poetry is not dead It is alive Just there Into your bloody heart And knocking It is a living And a little frightened animal Hidden in a dark ditch Near the main highway Looking at the colored cars Driving too fast And Showing us the way Poetry is a blast of freedom With a lot of reflections It is the sunshine At twelve o’clock Lighting up a big tree With a couple of crows Fallen in love To be convinced of that Have a look all around you Poetry is everywhere Moving in the air It is the flight of the eagle Above the mountains The heartbreaking song of the wolves Under the moonlight It is the silence of the deep forest The wild sound of the waves As a perfect appeasement Poetry is not dead It is a painted body With fire It is a smile on a face It is the laugh of children It is the mischievous eyes Of old people The forehead covered with wrinkles Poetry is not dead It is a white chapel With a beautiful young woman And a very long white dress As an angel It is also the sound of the bells And an old fashion black car In fact poetry Is you Inside And all around you Helping to feel better Giving all the strength To face the Night So for once Think twice Your children Your one love Or your wife Don’t lose yourself Live your life Think poetry As a poet That you already are Because in one word Poetry is everything Above all Poetry is all That will remain From us When we will be At our turn Billions Of very small atoms…

  • Le cauchemar de Hilda (1/7)

    Je vois l’amour de ma vie s’avancer sur le pont avec un bouquet de fleurs. Je voulais courir dans ses bras pour sentir la chaleur de son corps m’encercler et me faire oublier le temps et l’espace. Comme je voudrais être à la place de ce bouquet qui entrelace son bras ! Ce bouquet me rend jalouse et envieuse de lui mais je ne le hais point, car ces jolies fleurs sont élues pour moi. Je vois une tulipe blanche et une violette, entrecroisées à la manière de deux amoureux qui reconnaissent le feu d’amour pour la première fois. Elles trahissent l’affection inavouée de mon cher Salim. J’entends également le murmure des jonquilles qui me suggèrent le début certain d’une longue histoire d’amour et qui confirment mes doutes. Pourtant, je sens une mauvaise odeur, telle un cadavre en combustion, qui perturbe mes narines et qui me fâchent, cette odeur vient du camélia blanc. Il me communique, assurément, la déception de certaines âmes envieuses après m'avoir vu avec Salim. (Elle rit) Toutes me cachent un message d’amour timide de Salim, mon beau prince au cheval blanc dont j’attends un pas pour me rendre à lui sans regrets. Ses appâts me fascinent depuis l’enfance. Son amour germait et grandissait en moi involontairement. Hélas, cet amour me lasse ! Ce soir, le moment de ma quiétude vient, il va me déclarer son amour enfin. Ces fleurs me chuchotent une sentence d’amour tant désirée de sa bouche. (Silence. Elle se souvient de la date d’aujourd’hui. Il est le 13 avril, le jour de mariage de Salim avec sa meilleure copine, Tamara) (Hilda change de ton, elle semble perturbée) Impossible, ce n’est pas vrai ! Ce bouquet-ci est le mien ! Ce soir est la fête de mon mariage ! Il faut que je fasse mes appels avant qu’il s’approche ! Ma famille, je dois l’appeler pour accélérer les préparatifs de la cérémonie ! Il faut que j’appelle Tamara pour qu’elle me cherche une robe de mariage avant l’heure de la fête ! (Silence)Ta…. Tamara....... (Elle parle avec énervement) Cette sorcière au yeux verts et aux cheveux bruns, Celle qui joue l’innocente pour séduire le cœur de celui que j’aime depuis treize ans ! Celle qui est ma meilleure copine et ma grande souffrance ! L’être qui m’ôte la tranquillité et m’oblige à vivre dans l’ombre depuis des années alors qu’elle se réjouit de l’éclat de l’amante chérie et aimée. Cet amour qu’elle m’a volé au nom de l’amitié, je saurai le venger ! Elle n’est plus ma meilleure amie. Elle est désormais ma pire ennemie, ma témérité et ma fatalité ! Pas question qu’ils s’unissent par un lien éternel ce soir ! Ils marcheront sur mon cadavre si un calvaire pareil est réalisé. (Elle parle d’une voix mélancolique et déçue) J’ai su construire un royaume de cet amour dans lequel j’étais la reine. Je l’ai bien protégé de tous les yeux et je me réjouissais de le préparer pour que mon roi, Salim, y entre et reconnaisse la valeur des émotions que je lui portais. Ce soir, ils veulent que j’assiste à la ruine de mon royaume toute résiliée et immobile. Impossible ! (Hilda regarde Salim avancer vers elle et tisse son projet de vengeance intérieurement) Elle essaie de se redresser car Salim s’approche d’elle tout souriant et les yeux étincelants de joie, il la salue tendrement. Hilda se ressaisit et répond en souriant...)

  • Sans souvenir

    Écrire une microfiction en intégrant dans l’ordre que vous souhaitez “blessure”, “lumière” et “pamplemousse” (consigne de Mme Milena Mikhaïlova) Obscurité Lumière Flash violent Hurlements dans la chambre Réveil en sursaut, on me tire du lit ou plutôt d’un état comateux, je suis imprégné d’un rêve étrange et pénétrant, pour tout dire, je suis encore empêtré dedans J’ouvre avec douleur les yeux Un lit que je ne reconnais pas Bribes Je déroule le fil de ma soirée En remontant chronologiquement les événements et en essayant du mieux possible de les agencer un à un Mais rien ne vient Pour l’heure j’ai la tête gonflée comme un pamplemousse rose le cuir chevelu et mes doigts recouverts de sang guerre et paix plaies et blessures Les explications logiques viendront après Tout comme les regrets Et si j’étais rentré Et si je ne l’avais pas suivi au bar Et si Et si Et las Tout se mélange et devient flou dans mon esprit J’ai l’impression de devenir fou et de vivre comme dans un rêve ma propre expérience de dédoublement corporel Sauf que les bribes sont en suspension Et mon corps tout entier entre en lévitation Soudain les flics appuient sur l’interrupteur des cris : Pas un geste ! Je ne sais même plus où je suis Tous les événements se sont mélangés comme un élastique sur lequel on aurait trop longtemps tiré et qui se serait soudain violemment rompu Des fragments de moi Des restes de ma soirée un peu partout disséminés Voilà tout ce qu’il reste de moi Je passe une main sur mon crâne et la passe devant mes yeux Elle est recouverte de sang C’est une main rouge qui se détache sur le fond noir de la Nuit Je ne comprends rien à rien Je croyais dormir dans mon lit et faire un drôle de cauchemar Mais ceci n’a rien d’un rêve J’en veux pour preuve ces menottes que l’on me passe aux poignets Le métal est froid Et mes os cognent sur l’acier dur Suis-je devenu fou ? Bon sang, qu’ai-je fait ? Suis-je moi-même ? Suis-je un autre ? L’alcool ou sans doute les coups que l’on m’a portés au visage ont achevé ma quête symbolique de l’anéantissement Et je me vois déambuler dans les couloirs abandonnés de l’hôpital Comme si ma propre vie était en jeu Dans un film ou bien dans un jeu vidéo Je perds pieds J’agis Je fuis Je fuis ce monde aseptisé Et cette odeur de mort tout autour de moi Qui m’emplit les narines Et qui me renvoie en plein visage Les conséquences de ma décrépitude La soirée a tourné au désastre il semblerait Ma folie s’est montrée d’autant plus inconséquente Et pour la première fois de ma vie J’ai peur… Non pas de la mort Mais de me souvenir… XK (St Flo, le 29.04.22) Crédits : Le soldat blessé (1870) de Albert Anker (1831-1910), huile sur toile

  • Résultats du Petit Prix Littéraire FABLI

    La remise du prix a eu lieu ! Et les gagnants sont... Sujet 1 « La parole doit sortir du cœur et non de la bouche » - Colette Magny 🏅 Manon Saint-Yrieix, Licence 3 en lettres Sujet 2 « Nous traversons le présent les yeux bandés » - Milan Kundera 🏅 Lucille Lorieux, M1 FABLI Mention spéciale : ⭐️ Kama Datsiottié, M1 FABLI Retrouvez leurs textes ainsi que ceux des autres participants prochainement sur Fabli'o !

  • Tom et Jerry

    Écrire une microfiction à partir de la chanson Le Soleil a rendez-vous avec la Lune (version live) de Charles Trenet. (consigne de Mme Milena Mikhaïlova) Un deux trois, Tom court derrière Jerry Quatre cinq six, il ne l’attrape jamais Sept huit neuf, tout le monde voit qu’il essaye tout Mais qu’il l’atteigne, personne n’y croit Tom ne désespère jamais Malgré la longue journée Il ne se fatigue pas, il ne mange pas Car c’est Jerry qu’il veut Voici l’histoire de Tom et Jerry Leurs aventures m'ont toujours fait rigoler Jusqu'à la fin de ma vie, je regarderai Tom et Jerry. Tom tombe toujours dans le piège de Jerry Surtout quand ils passent devant le grand chien Ils s’arrêtent de courir pour un moment, dans l’espoir que le molosse n’entende rien Mais que dire à Tom qui veut atteindre Jerry ? Il ne patiente pas C’est pour ça qu’il se fait taper à chaque fois par le même chien. Encore une fois, jusqu’à la fin de ma vie je regarderai Tom et Jerry. Pour beaucoup leur histoire n'est qu'une perte de temps Pour moi elle est au-delà des mots Ça me rappelle mon enfance, mon grand-père et mon innocence Quand je les regarde je me dis que dans ce monde il n'y a pas que des mensonges Jusqu’à la fin de mes jours, je regarderai Tom et Jerry. Qui n’a pas regardé Tom et Jerry ? Je ne crois pas qu’il y’en ait un seul dans le monde entier Bien qu’on sache que le pauvre Tom a toujours eu des problèmes à cause de Jerry, Il ne pourra jamais vivre sans lui Je n’ai jamais vu un tel amour C'est pour cela que jusqu'à la fin de mes jours, je regarderai Tom et Jerry.

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